Header Critique : L'HOMME SANS OMBRE (HOLLOW MAN)

Critique du film
L'HOMME SANS OMBRE 2000

HOLLOW MAN 

Un savant, Sebastian Caine, découvre une solution qui rend les êtres vivants invisibles. Il se l'injecte, mais la formule qui doit le rendre à nouveau visible ne fonctionne pas ! En attendant un remède, il utilise son invisibilité pour assouvir ses fantasmes...

Après une décennie passée à Hollywood, à égrainer de beaux succès (ROBOCOP, TOTAL RECALL, BASIC INSTINCT), Paul Verhoeven rencontre des difficultés au milieu des années quatre-vingt-dix. D'abord avec l'échec de SHOWGIRLS de 1995, très mal reçu à sa sortie. Et surtout avec les faillites des studios américains indépendants sur lesquels il s'est appuyé : d'abord Orion (LA CHAIR ET LE SANG, ROBOCOP), puis Carolco (TOTAL RECALL, BASIC INSTINCT, SHOWGIRLS).

Il se rabat alors sur Sony / Columbia, une Major traditionnelle. Il y tourne STARSHIP TROOPERS avec le support de son complice scénariste Ed Neumeier (ROBOCOP). Il livre une vision satirique de l'utopie militariste exposée par Robert A. Heinlein dans son classique « Étoiles, garde à vous ! ». Le sarcasme passe au-dessus de la tête du public et de la critique. STARSHIP TROOPERS est tièdement accueilli, voire se trouve accusé de défendre la société fascisante qu'il tourne en dérision. Dépité, Paul Verhoeven se tourne alors vers un projet clé en main, un nouveau film dédié à l'Homme Invisible : HOLLOW MAN.

Au cours des années quatre-vingt-dix, la grande majorité des Monstres du Répertoire Classique sont revenus sur grand écran sous les auspices des Major Company. Sony propose BRAM STOKER'S DRACULA, FRANKENSTEIN, MARY REILLY (transposition de «Docteur Jekyll & Mr Hyde») et WOLF (dédié au loup-garou). Universal propose LA MOMIE, Paramount s'attaque à L'ÎLE DU DOCTEUR MOREAU. Reste quelques cas isolés non encore transposés. Certains  projets, bien que déjà lancés, mettront du temps à aboutir, comme LE FANTÔME DE L'OPÉRA basé sur le spectacle musical d'Andrew Lloyd Webber, qui sortira en 2004, ou KING KONG de Peter Jackson qui arrivera en 2005.

Reste donc le personnage de «L'homme invisible», créé dans le roman de H.G. Wells du même nom. Le film Universal L'HOMME INVISIBLE de 1933 a connu quatre suites à son époque. Mais ce livre n'a pas donné lieu à des nouvelles versions marquantes ensuite. Ainsi, la Hammer ne s'est pas aventurée à l'adapter. Les trucages optiques révolutionnaires de John P. Fulton dans le métrage de 1933 restaient durs à égaler dans les années cinquante et soixante, surtout avec les débuts des films en couleur qui compliquaient la donne.

Il faut l'arrivée des trucages numériques pour proposer une vraie avancée au public. Ce qu'a tenté John Carpenter avec LES AVENTURES D'UN HOMME INVISIBLE en 1992 (soit un an avant la renaissance des Grands Monstres initiée par BRAM STOKER'S DRACULA). Si ses effets spéciaux innovent, cette grosse production Warner, mêlant comédie et suspense, n'est pas un film d'horreur en tant que tel, et il ne rencontre pas le succès.

Au cours de la même décennie, le producteur Douglas Wick (qui œuvre notamment sur WOLF) porte le projet d'une nouvelle aventure horrifique de l'Homme Invisible. Il n'a toutefois pas les droits du roman de H.G. Wells et doit s'écarter de son récit. Il confie le scénario notamment à Andrew W. Marlowe, qui pousse le concept d'invisibilité vers des horizons voyeurs, violents et malsains. Le réalisateur allemand Wolfgang Petersen (L'HISTOIRE SANS FIN, ENEMY) est envisagé. Mais il se désiste pour tourner le film-catastrophe EN PLEIN TEMPÊTE.

Paul Verhoeven apprécie ce scénario et l'adapte donc, bénéficiant de l'assurance que son métrage sera, comme tous ses films sortis à Hollywood, classé R (interdits aux moins de 17 ans non accompagnés). Il choisit les deux acteurs principaux, à savoir Kevin Bacon (FOOTLOSE, TREMORS) et Elisabeth Shue (déjà martyrisée par un monstre à ses débuts : l'orang-outan sadique du remarquable LINK.

Il bénéficie des avancées du studio d'effets spéciaux numériques de Sony, de trucages matériels concoctés par la compagnie de Phil Tippett (ROBOCOP, STARSHIP TROOPERS) et de la musique de Jerry Goldsmith (TOTAL RECALL, BASIC INSTINCT).

Dans L'HOMME INVISIBLE, le savant s'étant injecté le sérum d'invisibilité est un être a priori débonnaire. Mais un ingrédient de la formule lui fait perdre la raison et le transforme en criminel mégalomane. Ce qui fait basculer le métrage dans l'épouvante.

Dans HOLLOW MAN, Paul Verhoeven présente aussi un homme invisible malveillant. Toutefois, il n'est ici nullement explicité que sa formule l'a rendu fou. Ce sont les seules potentialités de l'invisibilité et l'impunité l'accompagnant qui ouvrent les portes aux méfaits de Sebastian. Il emploie son pouvoir pour assouvir son désir de puissance et ses pulsions érotiques. Il en abuse pour violer sa voisine ou tripoter les seins de sa collègue endormie (ce qui vaut un effet spécial étonnant!).

Ses amis s'aperçoivent que Sebastian devient dangereux et cherchent à le neutraliser. Le film devient alors une succession de scènes d'action bien réalisées, visuellement étonnantes, mais malheureusement conventionnelles.

Le plus étonnant dans HOLLOW MAN est la qualité de ses effets spéciaux. Les scènes de transformation sont hallucinantes, tout comme les séquences où Caine se promène avec sa cagoule creuse. Verhoeven explore le sujet en refusant le sentimentalisme hollywoodien. Sa réalisation est énergique et hargneuse. Il ne se gène pas pour filmer des plans Gore ou pour mettre en scène un érotisme malsain. Son homme invisible est cruel et dénué de remords.  

Toutefois, le scénario ne s'avère pas à la hauteur des possibilités du sujet. La cruauté et le complexe de supériorité du savant pourraient être approfondis. Paul Verhoeven aurait pu aller plus loin dans certaines scènes.

La deux premiers tiers de HOLLOW MAN se suivent sans ennui, mais le final est une grosse scène d'action à l'américaine, avec bombes et compte à rebours, dont certains passages sont truffés d'invraisemblances. Le talent du metteur en scène fait tout de même son effet, et la dernière demi-heure du film reste redoutablement efficace.

HOLLOW MAN est le plus faible des quatre films de science-fiction tournés à Hollywood par Paul Verhoeven. Le spectateur passe un bon moment à le regarder, mais son scénario et son rythme auraient pu être plus soignés.

HOLLOW MAN connaît en salles un succès honnête, sans plus. Il engendre une suite tardive, HOLLOW MAN 2 de 2006, pour le seul marché du DVD.

Nous n'en avons pas fini avec l'Homme Invisible, puisqu'il fera son retour avec succès dans THE INVISIBLE MAN de Leigh Whannell, en 2020. Pour Universal et Blumhouse, il met ce mythe à la sauce de la masculinité toxique et connaît un succès surprise.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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