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Critique du film
LONG WEEKEND 2008

 

Le Festival de Gérardmer nous gratifia cette année de non pas d'un mais de deux remakes identiques à leur original. QUARANTINE polycopiant [REC], puis Jamie Blanks, le réalisateur de URBAN LEGEND et de MORTELLE SAINT VALENTIN ou encore du sympathique STORM WARNING, qui s'attaque à LONG WEEK END, le chef d'oeuvre réalisé en 1978 par Colin Eggleston.

Là aussi, un choix relativement curieux : Jamie Blanks a insisté pour effectuer un remake fidèle à l'original. Sans remettre en question la velléité de l'artiste et de ses choix propres, on se demande bien quel peut être l'intérêt d'une telle démarche. Comme pour QUARANTINE et la plupart des remakes/séquelles, la question pécuniaire n'est étrangère en rien au processus de mise en chantier d'un produit comme LONG WEEKEND. Maintenant, même si le scénario d'Everett de Roche, déjà l'auteur du film original, ne dévie pas d'un iota –hormis quelques dialogues ici et là-, après la vision du film, la question reste sans réponse précise.

Ainsi Peter et Carla (Jim Caviezel et Claudia Karvan) sont un couple en crise. (Après celui de HUSH, il y a de quoi paniquer sur le constat actuel du couple dans le cinéma de genre !). Ils décident de se mettre au vert durant un week end afin de faire le point mais ils semblent comme agressés par les éléments naturels autour d'eux.

Le spectateur ayant vu l'original s'amusera, à l'instar de QUARANTINE, au jeu des sept erreurs entre les deux versions. Non pas que Jamie Blanks ait effectué un copier/coller de l'original – le prénom de l'héroïne passe de Marcia à Carla, pour commencer – mais l'approche quasi verbatim a de quoi étonner, surtout après avoir subit QUARANTINE. Même format Scope, même couple se détériorant, même plage abandonnée, mêmes éléments qui se déchaînent et donc, même final. Aucune surprise pour les connaisseurs de la version de Colin Eggleston, tant ce nouveau LONG WEEK END suit à la lettre la structure initiale.

Le métrage ne va pas sans les hommages de rigueur. On notera ça et là : le bar où s'arrête Jim Caviezel s'appelle Eggleston (le nom du réalisateur de l'original), le médecin qu'appelle Carla se nomme Dr Hargreaves (l'acteur John Hargreaves jouait Peter dans la version de 1978). Et c'est bien le scénariste Everett de Roche qui apparaît au bar, barbu et casquette vissée sur le crâne.

Mais de ces faits précédents, quel apport et quelle différenciation peut apporter un auteur ? Jamie Blanks s'est appuyé sur son directeur de la photographie Karl Von Moller (STORM WARNING) qui a su capturer la nature exceptionnelle qui s'offrait à eux. A savoir la région de Victoria, lieu de tournage des deux versions. Ne serait-ce que par le générique de début, le spectateur est emporté par la beauté spectaculaires des décors naturels et de la fluidité de la caméra. Ce fut d'ailleurs le premier métrage australien à utiliser la caméra Arriflex D-20, première caméra digitale du groupe Arri, que Von Moller utilisa déjà lors du tournage australien de BRAQUAGE A L'ANGLAISE. C'est déjà ça de pris : le réalisateur et son directeur photo nous gratifient d'images splendides. Oui mais et alors ? Donner de jolies images ne fait pas un film.

Du côté de l'interprétation, Jim Caviezel a hérité d'un rôle de yuppie à la beaufitude prononcée. Un gros con, quoi. Un bon. Un vrai. Et il le joue bien, Jim. Parfois à la, limite de la caricature, ce qui nuit parfois au sérieux du film. Tout comme sa manie de toujours se retrouver torse nu afin d'épanouir son physique en voie astéroïdale terminale. Ceci dit, il ne fait pas de (Cavie)zel pour les scènes d'action, le générique indique qu'il a bénéficié d'une doublure pour les scènes ou il court ! Et l'on se demande parfois si Jamie Blanks n'a pas souhaité tenter de jouer la carte de l'humour second degré. Mais Caviezel surjoue parfois tellement son personnage qu'il désamorce le semblant de malaise qui se dessine dans certaines scènes. Tout comme ses affrontements avec sa femme qui virent là aussi dans un côté grotesque. Il devient évident à partir de là que le cinéaste échoue, vis-à-vis de l'original ou non, à installer un vrai climat d'angoisse. Les effets appuyés du regard des animaux… jusqu'à une scénette digne de BLANCHE NEIGE ET LES 7 NAINS lorsque Peter/Jim décroche la guitare. Leurs attaques ne donnent pas non plus dans la subtilité. Idem pour la scène du dugong qui frise au final le ridicule, alors que sa présence fantomatique dans la mer laissait présager une approche vraiment inquiétante.

Jamie Blanks se crédite ici non seulement de la place de réalisateur, mais également de producteur, compositeur et monteur du film. Beau travail d'auteur, une sorte de complétude artistique que peu possèdent, quelque part entre John Carpenter et Peter Hyams pour ne citer que les plus célèbres réalisateurs possédant plusieurs cordes à leurs arcs. Malheureusement, Jamie Blanks ne réussit pas sur tous les tableaux. La musique envahissante et permanente écrase le film plutôt que d'accompagner la mise sous pression voulue du spectateur. Et ce ne sont pas les quelques borborygmes musicaux électroniques permanents couplés à la beauté des images et du cadre qui pourront masquer l'incapacité à rendre la nature inquiétante, voire dangereuse. Si les protagonistes commettent bien des crimes écologiques (détritus, irrespect de l'environnement, etc...), la «vengeance» de la nature bien appliquée ici ne procure aucun frisson particulier. Au contraire, tout parait tellement appuyé, démonstratif que cela perd en efficacité. On n'échappe pas non plus au couplet sur le réchauffement climatique via une émission radio entendue dans le fond d'une scène. On a compris : la nature revient, et elle est pas contente !

Jamie Blanks fit juste avant un STORM WARNING qui, à défaut d'être lui aussi original, avait le mérite d'installer une atmosphère étouffante en huis clos pour finir en belle sauvagerie. Il semble qu'il ait suivi le même schéma pour aborder LONG WEEKEND, un huis clos en extérieur mais dénué de toute tension. Mais il est permis de penser que Jamie Blanks a souffert d'un manque temporaire de jugeotte avec ce remake-ci et qu'il reviendra parmi le monde des gens compétents en très peu de temps.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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