Header Critique : MAGIE NOIRE (LA MANSION DE LOS CTHULHU)

Critique du film
MAGIE NOIRE 1990

LA MANSION DE LOS CTHULHU 

Cinq malfrats se réfugient dans la maison du prestidigitateur Chandu. Ils le prennent en otage avec sa fille, mais ils ignorent que la demeure est hantée par des esprits plusieurs fois millénaires...

Le réalisateur espagnol Juan Piquer Simòn débute dans les années soixante et est surtout remarqué pour ses petites productions fantastiques qu'il commence à tourner la décennie suivante. Il touche ainsi à divers genres de l'insolite avec le sympathique CONTINENT FANTASTIQUE inspiré de Jules Verne, le film de super-héros désuet SUPERSONIC MAN, le slasher LE SADIQUE À LA TRONÇONNEUSE ou l'intéressant MUTATIONS et ses limaces tueuses.

À la fin des années quatre-vingts, le succès du RE-ANIMATOR de Stuart Gordon indique que les écrits de Lovecraft ont un potentiel commercial au cinéma. D'autre part, la déité malfaisante Cthulhu, inventée par l'écrivain, devient de plus en plus populaire comme elle se décline dans la culture populaire, en particulier à travers le célèbre jeu de rôles «L'appel de Cthulhu».

Toutefois, les écrits de Lovecraft ne sont alors pas encore libres de droits. Leurs transpositions restent sous contrôle au début des années quatre-vingt-dix. Nous voyons sortir vers cette période quelques vraies adaptations : FROM BEYOND de Stuart Gordon, LA MALÉDICTION CÉLESTE de David Keith, THE UNNAMABLE de Jean-Paul Ouellette ou THE RESURRECTED de Dan O'Bannon.

D'autres titres font des renvois plus officieux à l'auteur. Un film comme MAGIE NOIRE fait donc comme EVIL DEAD et son Necronomicon ou DÉTECTIVE PHILIP LOVECRAFT : il adresse des clins d’œil vagues à l’œuvre de l'ermite de Providence, sans adapter un texte précis. Ce qui permet de tâter de l'univers de Lovecraft sans payer de droits particuliers. Ainsi, MAGIE NOIRE a pour titre original LA MANSIÓN DE LOS CTHULHU, soit « La maison de Cthulhu ».

Tourné à Madrid, ce film met en vedette des acteurs anglais, notamment Frank Finlay dans le rôle de Chandu. Prolifique comédien spécialisé dans les seconds rôles, il a notamment joué le personnage de l'inspecteur Lestrade dans SHERLOCK HOLMES CONTRE JACK L'ÉVENTREUR et MEURTRE PAR DÉCRET, deux titres très réussis, mais néanmoins indépendants, relatant la même confrontation au sommet entre le limier de Baker Street et l'assassin de Whitechapel !

Le personnage de Chandu, protagoniste central de MAGIE NOIRE, n'a rien de particulièrement Lovecraftien. Créé dans un feuilleton radiophonique, il apparaît dans le cinéma fantastique hollywoodien des années trente avec CHANDU LE MAGICIEN, puis dans le Serial THE RETURN OF CHANDU. Bela Lugosi est en vedette des deux métrages, bien que dans des rôles différents : il n'incarne Chandu que dans le second titre. Américain s'étant formé aux arts mystiques orientaux, Chandu emploie ses pouvoirs pour lutter contre le crime, à la manière d'un Docteur Strange - personnage Marvel inspiré à Stan Lee justement par les aventures radiophoniques et cinématographiques de Chandu !

Mais revenons à notre MAGIE NOIRE. Au premier coup d'œil, les références à Lovecraft sont rares. Le sorcier de service détient un recueil de magie noire portant le nom "Cthulhu" sur sa couverture. Il cache ses grimoires dans un coffre dissimulé par une affiche de Houdini (fameux illusionniste auquel Lovecraft prêta sa plume pour la nouvelle «Prisonnier des pharaons»). Enfin, la grille du jardin s'enflamme à la fin du métrage et les lettres du nom Cthulhu apparaissent au-dessus d'elle.

L'histoire est celle d'un magicien qui convoque les forces du mal pour retrouver sa femme décédée. Depuis, une porte dans sa cave est ouverte sur l'enfer... Hélas, les dialogues sont hallucinants de sottise et de vulgarité. Les maquillages se limitent à une pâte épaisse étalée sur le visage des zombies.

La qualité de la photographie est à peine digne d'un film amateur. Les décors du "sanctuaire" sont misérables (une table, une nappe, un rideau et quelques bougies). N'oublions pas le jeu médiocre des acteurs. Enfin, MAGIE NOIRE est servi avec un doublage français fumeux, bâclé juste comme il faut !

L'humour (souvent involontaire) de ce film et son charme de petite production se trouvent atténués par une intrigue peu originale. Après un sympathique prologue, MAGIE NOIRE s'enlise dans une histoire de maison hantée quelconque. Les meurtres se succèdent platement et si certains sont amusants (de grandes mains griffues entraînent une fille dans un frigidaire), d'autres sont conventionnels. L'influence d'EVIL DEAD est trop perceptible (zombies ricanant, lierre agressif, souterrain hanté, grimoire maudit).

Bref, MAGIE NOIRE n'est pas la vraie rencontre espérée - ou redoutée - entre un spécialiste du cinéma Bis espagnol et Lovecraft. Reste une honnête histoire de maison hantée et l'atmosphère sympathique d'une toute petite production. Il y a quelques belles images à sauver (le spectre de la morte), mais il est dommage que le milieu de MAGIE NOIRE soit vraiment trop ennuyeux.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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