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Critique du film
HUSH 2008

 

Zakes et Beth (William Ash et Christine Bottomley), un jeune couple en crise, entrevoit subrepticement une femme en cage à l'arrière d'un camion. Poursuivant leur route, Zakes va finalement tenter d'en savoir plus, jusqu'à mettre sa vie et celle de son amie en danger, celle-ci se faisant enlever. La police l'accusant aussi du meurtre d'un vigile, il va s'employer à découvrir lui-même la vérité en pourchassant le camion

Les œuvres sur le trafic humain sont hélas devenues à la mode ces dernières années. Sujet grave, traité sur des modes relativement similaires. De la mini-série HUMAN TRAFFICKING de Christian Duguay à TRADE de Marco Kreuzpaintner en passant par LILYA-4 EVER ou encore SALAAM BOMBAY !, le cinéma de genre peinait à s'intéresser aux enlèvements, si l'on passe HOSTEL ou HOSTEL 2 qui traitent plus de la torture qu'autre chose. C'est donc le cas avec ce HUSH, petite production anglaise de moins de deux millions de dollars soutenue par Pathé et qui sort sur les écrans anglais en mars 2009. Il s'agit par ailleurs, après le thriller DONKEY PUNCH et le documentaire sur le monde des comics COMPLETE HISTORY du troisième projet de la société Warp X, montée il y a 18 mois par un consortium form par le UK Film Council, Film 4, Screen Yorkshire et la société de distribution Optimum Releasing.

Le titre garde encore tout son mystère, même après la vision du film. Pourquoi appeler un tel produit «Chut» ? Hormis le fait de demander aux jeunes filles concernées de se taire ou d'un secret à ne pas divulguer… c'est aussi tout le problème de la promotion d'un produit dont le nom a déjà été utilisée à maintes fois par le passé, du thriller de Jonathan Darby en 1998 au drame de Ryosuke Hashiguchi trois ans plus tard… sans compter aussi que le titre de HUSH s'applique aussi à trois autres œuvres sorties en 2008 !

Depuis quelques mois déjà, HUSH se balade de festival en festival afin de gagner en notoriété. Il semble que cette opération soit couronnée de succès, le film s'étant déjà vendu dans plus de 25 pays. Maintenant, cela suffit-il pour maintenir l'intérêt du spectateur au-delà de son idée de base ? Pas vraiment, tant le développement de l'histoire peut paraître intéressant et tendu dans son premier quart, tombe dans la facilité et le déjà-vu par la suite et sombre dans un final particulièrement grotesque. On serait bien embêté de décrire à quel genre se rattache HUSH, par ailleurs. Ses racines anglaises se font sentir via l'environnement social de son héros, sorte de semi-loser au boulot inintéressant. Mais là où certains films de genre anglais réussissent le mariage de l'horreur sociale, on sent bien ici que le réalisateur/scénariste Mark Tonderai (un ancien DJ, par ailleurs) ne souhaite pas s'embarrasser de ce point de vue. Exit les préoccupations sociales pour se focaliser sur la chasse du héros. Mais là aussi, le film peine à trouver sa voie. Thriller ? Horreur ? Suspense ? Torture Porn ? Pas assez de l'un, pas assez de l'autre… problème majeur d'un métrage ne sachant (ne voulant ?) pas choisir. Ce qui donne un côté bancal et prévisible dès l'irruption d'un troisième personnage (Claire Keelan). Son côté atypique pouvait encore plaire en fonction des prémices, mais une progression assez molle couplée à un sens de déjà-vu empêche toute adhésion.

Le problème initial avec HUSH reste qu'il arrive après la bataille. Sur l'odyssée du jeune homme innocent pris dans les mailles d'un piège qui se referme sur lui, on ne retient pas grand-chose. Si ce n'est celui d'un procédé déjà là aussi maintes fois utilisé. Une belle théorie du complot qui ne déparera pas dans son exploitation internationale mais qui ne trompera personne sur la marchandise. HUSH marche sur les plates-bandes de ses prédécesseurs. Et reprend d'ailleurs sans vergogne la trame d'un film comme SHUTTLE que nous avions chroniqué lors du marché du film de Cannes 2008. Si la narration de HUSH met en avant le héros à la rescousse de sa belle, le scénario suit la même pente que celle de SHUTTLE, tout en évacuant soigneusement le coté malsain, la brutalité et l'aspect dérangeant tout en enfilant les facilités de scénario et traits grossiers avec une certaine allégresse. Qu'il s'agisse de la jeune fille rencontrée miraculeusement au milieu de nulle part et qui indique s'être évadée du camion ou de l'arrivée du héros à la tanière du méchant (avec un container suspendu qui hurle «Je suis un élément scénaristique important» pour qui l'aperçoit du coin de l'œil), HUSH voit son chemin pavé d'intentions qui ont la légèreté d'un enclume.

Difficile de parler de la qualité visuelle de l'image, tant la projection en Betacam lors du festival de Gérardmer s'est avérée particulièrement laide. Une chose est sûre : le choix du format Scope se révèle totalement inutile, Mark Tonderai ne paraissant pas le moins du monde intéressé par l'exploitation du cadre qui s'offre à lui : peu d'intérêt pour la profondeur de champ ou le jeu sur plusieurs niveaux de l'action dans un seul plan, entre autres. Une action régulièrement cantonnée au centre de l'écran, comme si le réalisateur ne savait pas comment tirer parti de son format. La réalisation reste pauvre en imagination, excepté quelques plans (dont un à rester cloué au sol !) et la mise en scène reste à un strict niveau démonstratif. Tant au niveau du scénario que de la mise en images, rien n'est fait pour élever le film au-dessus du niveau minimum requis. On reste dans un métrage certes parfois solide mais dénué d'intérêt véritable, qui continue son bonhomme de chemin tout en laissant au spectateur l'espace nécessaire pendant les scènes de dialogue afin de regarder sa montre.

HUSH demeure au final un produit suffisamment standard et opportuniste pour pouvoir se vendre correctement à travers le monde. Une sortie française en salles parait plutôt risquée pour ce film doté d'aussi peu de personnalité : l'exploitation directe en vidéo ou via la télévision en France semble une solution plus raisonnable pour découvrir ce film. Mais une chose est sûre : pour un festival du film dit «Fantastique», un produit comme HUSH n'y avait peut être pas sa place !

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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