Header Critique : IT CAME FROM OUTER SPACE (LE METEORE DE LA NUIT)

Critique du film et du Blu-ray Zone B
IT CAME FROM OUTER SPACE 1953

LE METEORE DE LA NUIT 

John Puttnam (Richard Carlson), un astronome amateur et sa fiancée (Barbara Rush) voient un météore s'écraser en plein désert du Mojave. Sur place, ils découvrent un mystérieux vaisseau spatial qui disparait dans un éboulement. Personne ne croit à leur histoire mais certains habitants se révèlent comme possédés par une entité extra-terrestre xénomorphe. Dans quel but?

En 1952, le producteur/réalisateur et technicien Arch Oboler lança avec BWANA LE DIABLE un court cycle de films à succès avec une technologie qui tenta de faire diversion. Une Télévision éloignant les spectateurs des salles… la 3D les y ramena illico. Sentant le bon filon, plusieurs grands studios US s'engouffrèrent dans la brèche. Dont le département B d'Universal qui lâcha en 1953 IT CAME FROM OUTER SPACE, connu en France sous le titre LE METEORE DE LA NUIT.

Ce fut sous l'impulsion du producteur maison William Alland que l'aventure démarra. En faisant appel au réalisateur Jack Arnold, il initia une longue et fructueuse collaboration qui se solda par de nombreux classiques du fantastique : L'ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR (en 3D, ainsi que sa suite), TARANTULA ou encore L'HOMME QUI RETRECIT. Il embauche par la même occasion l'écrivain de science-fiction Ray Bradbury (auteur entre autres de "Chroniques Martiennes"), alors très en vogue, pour ébaucher un concept novateur. La SF américaine se trouvait alors empêtrée dans des paraboles anti-communistes, genre le pénible RED PLANET MARS. Alland souhaite définitivement une autre direction. Il s'agit d'ailleurs d'un tournant humaniste assez curieux, qui trouve ses racines dans L'HOMME DE LA PLANETE X d'Edgar G. Ulmer en 1951. Qui voyait un extra-terrestre atterrir par erreur sur Terre… et victime de la violence des terriens, voyant en lui l'intrus bousculant leurs certitudes. Une parfaite intégration de la paranoïa régnant dans les années 50, enfoncée dans la Guerre Froide.

Avec un budget de 750 000$, le canevas de base se révèle classique : le héros batailleur en proie à une foule incrédule - voir L'INVASION DES PROFANATEURS DE SÉPULTURES, entre autres, qui reprendra plusieurs thématiques présentes dans le film d'Arnold. Avec une héroïne (généralement potiche) qui sert de faire-valoir. Une menace plus ou moins identifiée et un climax. Rien de neuf sous le soleil. En apparence, car le fil conducteur initié par Ray Bradbury va mener le récit sur le thème apparent de l'envahisseur prenant corps et bien l'apparence humaine à des fins douteuses. Une réelle ambivalence, enracinée dans les peurs américaines du moment. Une peur irraisonnée de l'autre, celle qui galvanise la foule au point de provoquer colère voire pire. Un écho prémonitoire de nombreux cycles répétitifs de résurgence de haine de type d'extrême droite comme notre monde occidental semble connaitre en ce moment. La peur de l'autre et de l'inconnu -entrainant haine et violence.

Côté effets spéciaux, quelques choix contestables. Sur le look de l'alien, par exemple : celui- ci fut rajouté après la fin du tournage - Universal, ayant peur qu'un film de SF sans monstre ne fasse fuir les spectateurs. Le film accuse également une grossière erreur de narration. Révélé trop tôt, L'Alien tue quelque peu le suspense entourant non seulement son apparence mais également son impact sur le spectateur. En fait, ce sera bien le seul reproche qu'on ait envie de faire au film. Le reste se compose de magnifiques miniatures du vaisseau, de l'arrivée spectaculaire du météore en pré-générique et d'ingénieux effets visuels de caméra. Arnold utilise ces effets de manière parcimonieuse mais de manière toujours juste. A la fois dans la composition des plans (simple, aérée), au placement des personnages dans des espaces clos (comme les scènes de dialogues en ville) ou ouverts - profilant la menace de l'humain face aux « attaques » pouvant provenir de n'importe quel axe. Une gestion de l'espace et du cadre qu'Arnold perfectionnera dans TARANTULA et bien évidemment L'HOMME QUI RETRECIT, tout autant que dans UNE BALLE SIGNEE X. Avec en même temps un clin d'œil assez amusant sur l'utilisation du télescope… et la délicieuse ironie de l'extra-terrestre ne possédant qu'un seul œil.

Les deux grosses attractions de cette édition demeurent évidemment la présence de la 3D sur un support HD et de la piste stéréophonique. Arnold était l'un des rares cinéastes à avoir vraiment compris le sens et l'utilisation de la 3e Dimension. Bénéficier d'un effet plus de synergie entre les différents niveaux de lecture d'un plan, plus que de jeter n'importe quoi à l'écran pour justifier la 3D. Un peu ce que fit Charles Band avec METALSTORM 30 ans plus tard, par exemple. Ici, Arnold joue avec l'élaboration de décors en trompe l'œil, créant à la fois la profondeur de champ nécessaire en 2D et qui décuple l'effet en 3D : voir l'utilisation également des jeux d'ombres, vers 42mn34. L'autre bonne idée est de filmer à travers l'œil du Xénomorphe, permettant un point de vue inédit et un effet accentuant plus le bizarre que l'horreur. Un effet qu'on retrouvera plusieurs fois par la suite, dans TARANTULA!, LA MOUCHE NOIRE, CULT OF THE COBRA ou plus récemment L'EMPIRE DES FOURMIS GEANTES.

Via le traitement acharné des passionnés de 3D Archive, IT CAME FROM OUTER SPACE faillit arriver sous la bannière anglaise de Panamint Films. Un éditeur qui sortit précédemment INFERNO de Roy Ward Baker également en 3D. Universal sentit cependant une certaine appétence pour les films de catalogue en 3D. Et le studio se ravisa pour se réapproprier le film en Blu Ray non seulement en Grande-Bretagne, mais également sur le territoire américain. Arrive ainsi cette édition qui se révèle sans codage régional, offrant à la fois la version 3D et 2D. A noter que le choix de voir l'une de ces versions s'effectue via le menu en cliquant « play ». Le menu reste sur le mode Universal : un menu fixe avec en fond sonore la musique du film et les choix (lecture, chapitres, audio, suppléments) étant sur la gauche de l'écran.

Video: Encodée en MPEG-4 MVC (pour la 3D) et AVC (pour la 2D), Universal offre une expérience Blu Ray 3D/2D noir et blanc en 1080p la plus splendide qui soit pour ce titre, qui enfonce allègrement tous les DVD sortis jusqu'à présent. Le film se présente en format 1.37:1, noir et blanc et d'une durée complète de 80mn15. Il faudra passer sur quelques plans flous extérieurs (ce qui fut corrigé sur le Blu ray 3D de L'ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR, ceci posé), mais une très jolie définition attend l'heureux possesseur du Blu Ray. Le passage en HD accentuera quelques effets spéciaux approximatifs : les câbles tenants le météore arrivant en pleine figure, tout comme les effets de miroir, sont assez visibles. Mais le très original extérieur du vaisseau en forme de dodécaèdre gagne en dimension et en étrangeté. Les visages bien soulignés des acteurs, complétés par une profusion de détails clairs, laissent une très belle impression générale. Ceci tout en respectant le grain initial. On ne note pas de soucis de réduction de bruits notables… un vrai plaisir pour l'oeil.

Quand la 3D, même si l'ensemble se trouve un cran en dessous de L'ETRANGE CREATURE DU LAC NOIR, elle y apparait malgré tout sublime! Curieusement, assez peu d'effets forcés gratuits, mais une volonté immersive qui peut dérouter. Ceci rejoint le traitement de MAN IN THE DARK tourné la même année (et sortit en Blu Ray 3D chez l'éditeur américain Twilight Time). En fait, le premier plan après le carton-titre (il n'y a pas de générique, une rareté, comme pour THE MAGNETIC MONSTER la même année!), le plan en hélicoptère fait peur de par son flou général. Ce qui s'arrange nettement avec celui sur la maison où Richard Carlson et Barbara Rush s'entretiennent. On sent qu'Arnold maitrise (déjà!) la technique afin de mieux faire profiter de la 3D. Mettant en premier plan un objet (des bougies, à 1mn49), puis les acteurs, un troisième élément (ici un arbre de Josué) et enfin l'extérieur en dernier - afin de créer une dynamique d'image engendrant une profondeur naturelle. Aussi sympa que soient des films comme MAN IN THE DARK, INFERNO ou MISS SADIE THOMPSON sortis tous en 3D la même année, il n'y a pas le même attachement à la création de profondeur que ce qu'Arnold effectua ici. La vision du film en 2D, bien que fatalement différente, permet de retrouver cette sensation de travail à l'intérieur du cadre. La copie est stable, avec très peu de soucis de poussières blanches. Du très beau travail! On pointera malgré tout un recto de la jaquette assez mensonger, puisque proposant des photos couleurs!

Audio: 3D Archive retrouva de manière assez extraordinaire la piste stéréophonique d'origine enregistrée sur 3 canaux. Ce qui permet aujourd'hui de profiter pleinement de l'expérience originelle 3D + stéréo telle qu'elle fut conçue en 1953. Quelques distorsions sonores se font sentir sur quelques dialogues, mais la piste anglais non compressée en DTS HD MA 3.0 s'avère de très bonne tenue. Les effets stéréo se détachent nettement sur les canaux gauche et droite lors des bruitages et autres effets atmosphériques - notables dans les moments de suspens et autres créations de moments de quasi épouvante.

Suppléments : tout d'abord un commentaire de l'historien de cinéma Tom Weaver, le tout en langue anglaise. Il possède un débit vocal plutôt impressionnant, il faudra donc bien se concentrer afin de profiter de l'avalanche de détails qui se déverse dans les enceintes! Le commentaire part de ce fait un peu dans tous les sens, sautant d'un événement se passant sur l'écran à un autre totalement périphérique. Un précis de compte-rendu sur les jours de tournage (vers la 17e mn) à la carrière de Richard Carlson sombrant dans l'alcool… pour revenir brutalement au tournage en intérieur vers la 20e minute, par ailleurs maintenu sous le sceau du secret… Universal souhaitant battre la Warner dans la course à la 3D avec L'HOMME AU MASQUE DE CIRE. Tom Weaver est une vraie mitraillette du langage. On ne sait s'il lit un texte (probablement) ou si les informations sortent naturellement, mais j'avoue avoir été un peu fatigué de l'entendre en permanence, sans presque aucune pause. Et m'y reprendre à plusieurs fois afin d'écouter le commentaire en entier. Qui, il faut le reconnaitre, demeure une mine d'incroyables informations sur le tournage, la production et la sortie du film.

Ensuite, déjà présent sur le Blu Ray 3D RARITIES sorti chez Flicker Alley, on retrouve le film annonce d'origine en 3D, ou au choix en 2D. Un message spécifique apparaitra sur l'écran pour quiconque sélectionne le film annonce 3D sans être équipé pour - et sera automatiquement basculé en 2D. Bien vu. Enfin, un documentaire de 2000 assez fun nommé «The Universe according to Universal», déjà présent sur l'édition DVD US du film sortit en 2002. Il retrace la perception SF du studio, entre peurs du public et la volonté d'aller parfois à contre-courant des genres pour donner les meilleurs classiques. Avec une analyse plutôt fine sur les origines de l'histoire, et du contenu d'IT CAME FROM OUTER SPACE. Ainsi que son importance dans le lancement du cycle de films de SF des années 50. Rappelant à quel point les dialogues évocatifs et poétiques de Bradbury réussirent à rester dans le film. A ne pas manquer aussi, l'intervention d'un des trois compositeurs de la musique du film, Irving Gertz. Il faut préciser de ce fait qu'aucun des trois compositeurs originaux (Henry Mancini, Herman Stein, Irving Gertz) ne furent crédités. Seul Joseph Gershenson le fut au générique, alors qu'il ne composa en rien des 36 minutes de musique du film! Enfin, il reste à mettre en avant les apports de Bob Furmanek, Mr 3D Archive, sans qui rien de cette édition n'aurait été possible.

En clair, pour les amateurs de science-fiction que nous sommes, IT CAME FROM OUTER SPACE s'avère une excellente surprise. De revoir le film dans des conditions optimales, en Haute Définition 3D ou 2D et qui plus est, bénéficiant de sous-titres français, de la piste audio stéréophonique originale et dans codage régional. Que demander de plus?

Ce Blu Ray de IT CAME FROM OUTER SPACE est donc hautement recommandé ! Surtout que tout est sous-titré en français. Le film, bien sûr, mais aussi le documentaire et le commentaire audio. Pour ce dernier, il est possible que vous soyez obligé d'activer les sous-titrages français en utilisant la touche de votre télécommande !

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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L'édition vidéo
IT CAME FROM OUTER SPACE Blu-ray Zone B (Angleterre)
Editeur
Support
Blu-Ray (Double couche)
Origine
Angleterre (Zone B)
Date de Sortie
Durée
1h21
Image
1.33 (4/3)
Audio
English DTS Master Audio 3.0
Sous-titrage
  • Anglais
  • Français
  • Espagnol
  • Supplements
    • The Universe according to Universal : featurette (31mn36)
    • Commentaire audio de Tom Weaver
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