Header Critique : ORPHELINAT, L' (EL ORFANATO)

Critique du film
L'ORPHELINAT 2007

EL ORFANATO 

A l'approche de la quarantaine, Laura décide de reprendre l'orphelinat où elle a grandi pour le transformer en centre d'accueil pour enfants handicapés. C'est autant l'occasion d'un nouveau départ professionnel avec son mari Carlos qu'un prétexte pour que son jeune fils Simon, garçon adopté et porteur du VIH, puisse côtoyer d'autres enfants de son âge tout en restant chez lui pour suivre ses traitements. Tandis que le couple s'installe, Simon ressent la «présence» d'autres enfants dans les murs de la maison. Quelque temps plus tard, le garçon disparaît. Laura et Carlos vont explorer toutes les pistes pour le retrouver, y compris les indices liés au surnaturel.

L'ORPHELINAT est le premier long-métrage de Juan Antonio Bayona, un transfuge de la télévision espagnole. Un inconnu pourtant parrainé par un «aïeul» prestigieux, le mexicain Guillermo Del Toro, présent au poste de producteur exécutif. Un nom respecté à l'origine d'un buzz qui s'est vite révélé hors de contrôle. En effet, L'ORPHELINAT impressionne tout d'abord par son CV : avalanche de prix dans les festivals internationaux (dont le Grand Prix et le Prix du Jury de Gérardmer en 2008), 14 nominations aux Goyas (un record) pour 7 statuettes remportées (dont celle du meilleur «espoir» à la mise en scène et du meilleur scénario), nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, mais surtout plus grand succès de tous les temps sur le sol espagnol. C'est donc en conquérant que L'ORPHELINAT arrive (avec beaucoup de retard) sur les écrans français. Un retard qui a su alimenter les attentes d'un film au parcours hors norme, et pourtant au contenu souvent très classique.

L'ORPHELINAT s'inscrit très clairement dans la vague du fantastique ibérique consolidé notamment par LES AUTRES de Alejandro Amenabar, L'ECHINE DU DIABLE de Guillermo Del Toro, FRAGILE de Jaume Balaguero ou encore ABANDONNEE de Nacho Cerda. Les apparitions fantomatiques, le rapport à l'enfance et à la mort, la crise identitaire de l'adulte, L'ORPHELINAT reprend une nouvelle fois ces thématiques sans en apporter de véritables renouvellements. En revanche, le film de Bayona en constitue une sorte de synthèse de très haut niveau grâce à un scénario très travaillé, une mise en scène efficace sans jamais perdre en élégance, une direction artistique méticuleuse et une interprétation impeccable. Comment ne pas saluer la formidable Belen Rueda dans le rôle principal, qui compose un nouveau portrait de femme brisée qui n'a rien à envier à ses glorieuses aînées (Nicole Kidman en tête). Une performance d'autant plus épatante que Rueda est une comédienne débutante (elle est connue en Espagne en tant que présentatrice télé).

Bien que classique, L'ORPHELINAT n'oublie pas de se faire dérangeant. On pense surtout au terrible cadre familial du film, qui ose nous peindre un couple ayant adopté un enfant atteint d'une maladie incurable. Cette idée est aussi terrifiante que les régulières apparitions des «enfants» ayant habité jadis l'orphelinat. La grande force du film de Bayona est ainsi de se montrer aussi à l'aise dans l'horreur psychologique que dans les séquences purement horrifiques à base de portes qui claquent et d'apparitions étranges (mention spéciale à l'enfant coiffé d'un masque en tissu pour cacher une monstruosité génétique). L'ORPHELINAT fait vraiment peur, grâce à son savant dosage entre effets chocs et drames du réel. On n'avait d'ailleurs pas autant frissonné à l'écran que lors d'une séance de spiritisme où le couple et une équipe de spécialistes suivent le parcours d'un médium dans l'orphelinat au travers de moniteurs de caméras infrarouges. Il est à parier que cette séquence risque elle-même de devenir un classique du cinéma fantastique dans les années à venir.

La qualité narrative et l'exigence formelle de L'ORPHELINAT parviennent donc sans mal à nous faire oublier quelques ficelles un peu trop usitées ou encore certaines scènes un peu trop sous influence (comme une séquence tentant, vainement, de remaker le traumatisant monologue nocturne de LA MAISON DU DIABLE de Robert Wise). Pire, c'est vers notre SAINT-ANGE national que louche le final (une coïncidence car le scénario est antérieur au film de Pascal Laugier). Cela ne doit en rien gâcher le plaisir de la découverte de L'ORPHELINAT, que l'on pourrait voir comme un très bel épilogue à cette vague de fantômes espagnols. Le succès phénoménal du film risque pourtant de relancer cette formule pendant encore quelque temps. Une nouvelle à prendre avec circonspection car L'ORPHELINAT, derrière ces nombreux atouts, arrive malgré tout au point où tout semble avoir été dit sur le sujet.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
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