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Critique du film
VIDEODROME 1982

 

En 1983, le réalisateur canadien David Cronenberg est déjà une valeur sûre du cinéma fantastique à la personnalité affirmée.

Il a commencé par des métrages expérimentaux (STEREO et CRIMES OF THE FUTURE) avant de se tourner vers des séries B commerciales (FRISSONS et RAGE). Avec CHROMOSOME 3 en 1979, il s'associe au producteur canadien Claude Héroux avec lequel il amorce une trilogie constituant une pierre angulaire de sa filmographie Elle synthétise son cinéma de science-fiction expérimental et ses œuvres d'horreur.

Après CHROMOSOME 3 vient SCANNERS, affrontement entre mutants aux effets spéciaux mémorables, supervisés par le grand Dick Smith. SCANNERS connaît un joli succès et David Cronenberg accède à des moyens plus importants. Il songe un temps à une nouvelle version de « Frankenstein », puis renonce et s'oriente vers le projet VIDEODROME, troisième et dernière de ses coopérations avec Claude Héroux. Il bénéficie pour la première fois du soutien d'une Major, Universal qui  co-produit le métrage.

Pour tenir la vedette du film, Cronenberg choisit James Woods, révélé par Elia Kazan pour LES VISITEURS de 1972, film où l'acteur incarne un vétéran du Vietnam harcelé par d'anciens compagnons d'armes. Après ce rôle de gentil, James Woods se spécialise dans des rôles plus ambiguës, dans BANDE DE FLICS de Robert Aldrich ou TUEUR DE FLICS de Harold Becker. On note aussi dans VIDEODROME la présence de Debbie Harry, chanteuse du groupe Blondie, très populaire au début des années quatre-vingts.

VIDEODROME conclut la première période de la filmographie de David Cronenberg. Ses métrages mettent en scène les résultats d'expérimentations scientifiques, généralement sur l'homme. Les corps humains, notamment les cerveaux, y subissent des mutations mal maîtrisées. Ces expériences entraînent des métamorphoses gore et Cronenberg ne rechigne pas sur les images violentes.

VIDEODROME suit Max Renn, responsable d'une chaîne diffusant des programmes violents ou pornographiques. Pour lui, il s'agit de business et il ne se soucie pas de philosophie ou de responsabilité. En cherchant des nouveautés, il tombe sur un étrange programme émis par satellite : Vidéodrome. Cette émission diffuse des meurtres et des tortures ritualisées dans un décor abstrait.

Fasciné, mais convaincu qu'il s'agit de reconstitutions, il enquête sur cette émission mystérieuse. Il devient alors victime d'hallucinations. C'est là la première intrigue qui est proposée au spectateur, qui peut alors croire qu'il s'agit d'une quelconque histoire de snuff movie (comme HARDCORE de Paul Schrader).

VIDEODROME glisse lentement vers une science-fiction rehaussée d'une réflexion politique. En effet, Vidéodrome n'est pas un programme télévisé : il s'agit d'une onde transmissible à travers n'importe quel signal vidéo diffusé sur une télévision (par le câble ou sur une cassette). Cette onde peut faire muter le cerveau des personnes exposées. On peut alors leur envoyer à volonté des ordres et en faire des soldats obéissants.

Max Renn devient un de ses hommes sans volonté, enjeu d'un conflit entre deux puissantes sociétés secrètes : la Nouvelle Chair, qui veut libérer les hommes de l'influence des machines d'une part ; Vidéodrome, financée par de puissants groupes industriels et prônant des valeurs d'extrême-droite d'autre part. Une guerre souterraine (qui n'est pas sans rappeler SCANNERS) se déclenche pour la détention des chaînes de télévision et des moyens d'information.

Au-delà du remarquable scénario, nous retrouvons le style maîtrisé et efficace de Cronenberg. Mécanique et organique se mélangent avec délectation (la télévision, Max Renn se transformant en magnétoscope). Certaines hallucinations sont des moments très gores et très graphiques, dans lesquels les corps humains sont soumis à des torsions et des pressions dévastatrices, comme les têtes de SCANNERS.

Ces visions construisent le récit selon une structure originale. Plus le film avance, plus il est difficile de savoir quand Max Renn est soumis à des hallucinations, ou quand celles-ci sont le produit de son cerveau ou de Vidéodrome. La fin est à ce titre énigmatique.

Doté d'une réalisation rigoureuse, parfaitement interprété, VIDEODROME impressionne encore aujourd'hui par la qualité et l'originalité de son récit. Il aura une influence déterminante sur la littérature et le cinéma de science-fiction à venir. Synthèse et conclusion de la première période de la carrière de David Cronenberg, il s'agit d'une de ses œuvres les plus réussies.

Pourtant, le métrage connaît un accueil public mitigé, en dépit de bonnes critiques. Cronenberg rebondit rapidement en tournant DEAD ZONE, remarquable adaptation de Stephen King affichant un tournant hollywoodien dans la filmographie du réalisateur.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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