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Critique du film
REPO MEN 2010

 

Vous n'avez pas payé les traites de votre voiture ou de votre maison ? Nul doute que les huissiers vont se charger de saisir tout cela. Maintenant si c'est l'un de vos organes artificiels que vous avez omis de régler dans les temps, ce sont les Repo Men qui vont se charger de récupérer le bien en question.... Et si les huissiers ne sont pas drôles, les Repo Men le sont encore moins puisque leurs interventions musclées se terminent généralement par la mort du client endetté. D'un autre côté, on imagine bien volontiers que la récupération d'organes n'est pas un emploi des plus simples. Reste que dans un monde où l'argent est roi, un job est un job. C'était du moins l'opinion de Remy, jusqu'à ce que l'une de ses «saisies» tourne mal et qu'il soit lui-même dans l'obligation de subir une coûteuse transplantation...

Voilà une quinzaine d'années que Miguel Sapochnik gravite dans l'univers du cinéma mais, comme beaucoup, c'est dans l'ombre qu'il exerce son talent. En effet, notre bonhomme est Story-boarder et pour son premier boulot, Danny Boyle l'invite à travailler sur le cultissime TRAINSPOTTING. Les deux hommes se retrouveront peu après pour l'enjoué et dynamique UNE VIE MOINS ORDINAIRE. Ces deux travaux (entre autres) permettent à Sapochnik de voir Boyle à l'œuvre en plus d'acquérir un sens du cadre et de la mise en scène. Aussi, le «croqueur» ambitionne t'il rapidement de passer à la réalisation. Ce sera chose faite en 2000 avec le court métrage THE DREAMER qui lui vaudra d'élogieuses critiques. En 2003, il se greffe au projet «The Repossession Mambo» que portent l'écrivain Eric Garcia et le scénariste télévisuel Garrett Lerner. Le concept mûrira donc avec les années pour devenir en 2009 un livre et, pratiquement dans la foulée, un film...

REPO MEN est de ces œuvres de science-fiction qui, à l'image de 1984 par exemple, prennent leurs racines dans le quotidien de notre société et ses dérives potentielles. Eric Garcia et Garrett Lerner jettent donc ici un regard désabusé sur le capitalisme et la privatisation à outrance. Dans un monde où la plupart des gens vivent à crédit et où la santé devient une question d'argent, pourquoi ne pas extrapoler davantage et radicaliser le propos ? C'est là toute l'idée qui, bien que farfelue en apparence, s'avère être aussi un bien amer constat. Sans être un film politique ou même politisé, REPO MEN n'est donc pas un film idiot. Et s'il arrive qu'il prête à rire, c'est toujours de cette étonnante dualité, de ce paradoxe qui fait que l'on fonce dans un mur sans trop y croire, tant l'image nous parait aberrante.

Dans son film, Miguel Sapochnik entretient donc le contraste. L'extrême violence des situations fait face à l'incroyable détachement des «Repo Men» et l'aspect désincarné de la société entre en opposition avec les couleurs vives d'une ville dynamique. La bande originale elle-même, de par son refus de céder à la facilité, contrebalance avec une élégance rare l'action et la dureté des images. Enfin l'aspect bicéphale du métrage trouve écho jusque dans son casting. Jude Law, l'un des séducteurs d'Hollywood, est ici un tueur de sang froid alors que Forest Whitaker, malgré sa légendaire bonhomie, s'avère pire encore ! Aussi étrange que cela puisse paraître, l'obstination de Miguel Sapochnik à cultiver tout et son contraire fonctionne parfaitement et ce dès les premières images. Ces choix systématiques mènent à un équilibre rafraîchissant qui fait de REPO MEN une œuvre à part dans l'univers du cinéma d'anticipation.

En cela, ce nouveau film rappelle sans aucun doute le TOTAL RECALL de Paul Verhoeven. Les points communs sont nombreux et ce que l'on aborde la thématique, l'univers, le ton ou la présence d'une «rébellion» sérieusement mise à mal. Même le duo féminin Sharon Stone / Rachel Ticotin trouve ici son reflet via les actrices Carice Van Houten et Alice Braga. Enfin, le film de Miguel Sapochnik voit également planer l'ombre de Philip K. Dick par le biais de ses obsessions pour la réalité et l'apparence de celle-ci... Une influence tout aussi évidente que peut l'être la filmographie des Monty Python, régulièrement granguignolesque et acerbe. On notera du reste que REPO MEN ne renie aucunement ses racines en affichant, une poignée de secondes durant, quelques images du cinquième chapitre du SENS DE LA VIE intitulé «Live Organ Transplants»...

Enfin malgré son refus d'entrer «dans le moule», REPO MEN est également un film dans l'air du temps, qui aligne donc les effets gores avec autant de générosité que les séquences d'action. En 2002, EQUILIBRIUM avait rajeuni FAHRENHEIT 451 à grands coups de pompes dans la gueule. REPO MEN fait de même avec les influences précitées, allant jusqu'à offrir des combats au hachoir ainsi qu'une séquence d'«amour» mémorable dans laquelle «pénétration» rime avec «larges lésions» !

Divertissant, rythmé, plutôt malin et doté d'un casting irréprochable, le premier long métrage de Miguel Sapochnik est donc l'une des belles petites surprises de l'année. Aussi, nous ne pourrons que regretter une sortie en salles des plus confidentielles. Reste que l'épanouissement viendra, nous n'en doutons pas, à l'heure des parutions en DVD et Blu-Ray. La présence d'un Director's Cut devrait apporter davantage de richesse aux personnages et, avec un peu de chance, gommer l'unique bémol qu'est la fin assez prévisible du métrage.

Rédacteur : Xavier Desbarats
Photo Xavier Desbarats
Biberonné au cinéma d'action des années 80, traumatisé par les dents du jeune Spielberg et nourri en chemin par une horde de Kickboxers et de Geishas, Xavier Desbarats ne pourra que porter les stigmates d'une jeunesse dédiée au cinéma de divertissement. Pour lui, la puberté n'aura été qu'une occasion de rendre hommage à la pilosité de Chuck Norris. Aussi, ne soyons pas surpris si le bougre consacre depuis 2006 ses chroniques DeViDeadiennes à des métrages Bis de tous horizons, des animaux morfales ou des nanas dévêtues armées de katanas. Pardonnez-lui, il sait très bien ce qu'il fait...
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