Header Critique : AUX FRONTIERES DE L'AUBE (NEAR DARK)

Critique du film et du DVD Zone 2
AUX FRONTIERES DE L'AUBE 1987

NEAR DARK 

Caleb (Adrian Pasdar) est un jeune paysan vivant avec son père et sa sœur dans une toute petite ville d'Arizona. Lors d'une virée nocturne, il tombe sous le charme de Mae (Jenny Wright), une inconnue à la beauté fragile. Le rendez-vous qui s'ensuivra ne débouchera cependant pas sur un baiser, mais sur une morsure que la mystérieuse jeune fille prodiguera dans le cou de Caleb. Il n'en faut pas plus pour que ce dernier soit transformé en vampire, et du même coup obligé de rejoindre le groupe de Mae pour des virées sanglantes nuit après nuit.

AUX FRONTIERES DE L'AUBE est le deuxième long métrage de Kathryn Bigelow, réalisatrice qui connu son heure de gloire avec le démodé POINT BREAK tout en surfant sur la notoriété de James Cameron pour en avoir partagé la vie durant quelques années. La connivence avec le réalisateur de TERMINATOR ne se résumera pas à la vie privée puisque de nombreuses passerelles se tisseront entre leur carrière respective. Bigelow s'inspirera fortement du style visuel de Cameron pour son polar BLUE STEEL, Cameron sera l'instigateur de STRANGE DAYS tout en cosignant le scénario, et Bigelow reprendra tout un pan du casting de ALIENS pour AUX FRONTIERES DE L'AUBE (avec Lance «Bishop» Henriksen, Bill «Hudson» Paxton et Jenette «Vasquez» Goldstein).

AUX FRONTIERES DE L'AUBE marque surtout la première collaboration avant BLUE STEEL entre Bigelow et le scénariste Eric Red (on lui doit entre autre le script de HITCHER). L'ambition du duo est ici de rénover de fond en comble le mythe du vampire pour nous en livrer une version à contre courant. Adieu les ambiances gothiques, les Dracula séducteurs, les transformations en chauve-souris et toute l'artillerie codifiée à l'extrême du suceur de sang. Ici, l'ambiance est clairement orientée vers le western, faisant de son groupe de vampires des desperados burinés condamnés à un exil permanent. Ces derniers doivent consommer du sang humain quotidiennement, les obligeants à bouger géographiquement sans laisser de traces, sous peine de faire parler les colts avec la police locale.

L'aspect fantastique est clairement épuré. Bigelow et Red dégraissent toutes références folkloriques déjà admises par le spectateur (le crucifix, l'ail, dormir dans un cercueil), pour y conserver que les traits essentiels à savoir la soif de sang en échange d'une immortalité, et la vulnérabilité à la lumière qui les brûle instantanément. Cette épure n'a finalement qu'une vocation «réaliste», AUX FRONTIERES DE L'AUBE ne se voulant pas un film trop démonstratif dans le fantastique afin de concentrer tous ses efforts sur ses personnages. Le duo redouble d'efforts en ce sens, nous présentant des vampires plutôt victimes de leurs sorts, où seul le personnage de Bill Paxton semble y trouver un défouloir à son hyper violence.

L'excellente idée concernant les personnages est de les montrer totalement usés par le temps, la monotonie sans fin de leur existence étant finalement beaucoup plus difficile à supporter que l'acte de tuer ou bien la peur de la lumière du soleil. C'est finalement cette solitude imposée que le groupe de vampires essayent de fuir par tous les moyens, la seule solution étant de trouver une compagne ou un compagnon afin de partager cet isolement. Ce ressort explique pourquoi Mae convertira Caleb à l'issue de leur rendez-vous amoureux, tout comme il justifiera la poursuite folle d'Homer, un adulte par l'âge bloqué dans un corps d'enfant, pour mordre la petite sœur de Caleb (et ainsi en faire une compagne à son image).

Cette peinture des personnages bloqués à l'intérieur d'un mythe revu de fond en comble fait donc tout l'intérêt d'AUX FRONTIERES DE L'AUBE. L'argument narratif déjà plus classique (nous suivons un personnage tout juste vampirisé refusant de tuer pour se nourrir) n'empêche pas l'immersion tant les scènes fortes se multiplient au sein d'un script parfaitement rythmé. On retiendra à ce titre l'excellente séquence du film où le groupe s'enferme dans un bar paumé pour y supprimer un à un les consommateurs. La longueur et le sadisme de cette scène étant d'autant plus pesant que cette descente correspond à la dernière chance de Caleb de faire enfin couler de lui-même le sang (il se nourrissait jusqu'à présent du poignet ouvert de Mae).

Mais si la mise en scène de Bigelow est très souvent inventive et touche à tout (le film flirt avec le western, le road movie, l'action), il faudra faire de temps en temps abstraction du petit côté daté de certains points du film (ce dernier date tout de même de 87), comme la musique synthétique du groupe Tangerine Dream outrancièrement mise en avant par une réalisatrice alors convaincue de l'impact du vidéo-clip dans la narration cinématographique. De même, si les comédiens possèdent une incroyable présence à l'écran (mention spéciale à Lance Henriksen), ces derniers souffrent d'une direction d'acteur un peu hésitante conférant de temps à autre un petit bémol à l'excellente interprétation de chacun. Mais qu'importe ces quelques réserves, AUX FRONTIERES DE L'AUBE tient haut la main toutes ses promesses et constitue toujours, plus de quinze ans après sa réalisation, l'une des meilleures relectures du mythe vampirique.

On vous parlait récemment du traitement fait au ténébreux L'ECHELLE DE JACOB en édition française, c'est-à-dire petit prix pour quasi aucun supplément. Ce même éditeur suit cette politique avec AUX FRONTIERES DE L'AUBE servi dans les mêmes conditions. Allons néanmoins à l'essentiel : la qualité du film. Cette dernière est heureusement sans le moindre reproche. Si les premières images du générique indiquent une copie au grain assez important, tout rentre dans l'ordre quasi immédiatement, rendant ainsi justice à la photographie nocturne si travaillée du métrage. Pas de remix audio cette fois, on se contentera donc d'une piste stéréo surround claire et précise en anglais, et un mono d'honnête facture en français. Côté suppléments, le consommateur français qui espérait retrouver les bonus de la très complète édition zone 1 (commentaire audio, documentaire, scènes coupées, story-board…) en sera pour ses frais. Une seule et unique petite bande-annonce est disponible histoire de sauver l'honneur, c'est très peu.
De notre côté, nous vous donnons la possibilité de découvrir une galerie de photos dans notre base de données (ici).

Dans le carcan rigide du film de vampire, AUX FRONTIERES DE L'AUBE fait figure d'excellente alternative via une relecture du mythe qui n'a rien perdu de son impact en plus de quinze ans. Un classique de la série B haut de gamme, aujourd'hui relayé dans les rayonnages «budgets» des magasins. Dommage, AUX FRONTIERES DE L'AUBE aurait mérité une édition franchement plus complète dans notre pays. Le ton très adulte du film le destinait pourtant à une cible qui n'aurait pas rechignée à mettre un peu plus pour un contenu plus définitif.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
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287 critiques Film & Vidéo
On aime
Une relecture du mythe vampirique toujours pertinente
Une mise en scène efficace qui brasse les genres
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Quasiment pas de bonus
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L'édition vidéo
NEAR DARK DVD Zone 2 (France)
Editeur
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h34
Image
1.85 (16/9)
Audio
English Dolby Digital Stéréo Surround
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
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