Header Critique : LOVED ONES, THE

Critique du film
THE LOVED ONES 2009

 

THE LOVED ONES arrive auréolé d'une réputation flatteuse. Ayant raflé quelques prix ça et là dans divers festival, dont celui de Sitgès en 2010, traité de film d'horreur à la John Hughes... Tout ça c'est bien joli, mais le film est-il à la hauteur des attentes générées ? Le Festival Fantastique de Gérardmer 2011 l'a donc catapulté en sélection officielle, et il y a raflé quelques prix au passage.

Brent (Xavier Samuel) est un adolescent beau et ténébreux mais quelque peu déstabilisé par la mort de son père dont il est partiellement responsable. Il est enlevé par Lola (Robin McLeavy) qui souhaite en faire son parfait petit ami pour la soirée de fin d'année du lycée, quitte à employer les grands moyens jusqu'à la torture.

Un plaisir certain, malicieux, entre rire et malaise existe à la vision de cette boucherie annoncée. Ce n'est pas l'exploitatif de teenage angst version HOSTEL, mais un esprit 16 BOUGIES POUR SAM tordu qui souffle sur la destinée de l'héroïne complètement dérangée. Du moins à nos yeux, car elle semble en parfait équilibre dans son propre monde. Monde totalement validé par son père.

THE LOVED ONES apporte une re-contextualisation des éléments de comédie adolescente mais ne se limite pas à une réinterprétation de cet univers aseptisé – comme peuvent le faire un film comme EASY A, par exemple. Le film file vers le recyclage, la réinvention, la re-discussion de l'angoisse adolescente à des fins de film de genre.

Paradoxalement, la symbolique adolescence soit capable à la fois de révéler et de masquer les aspects problématiques de la formation de ce nouveau courant social. Une nouvelle structure familiale – avec des élans transgressifs notables - et donc un nouvel ordre moral. L'intelligence du propos pousse le spectateur dans ses retranchements. Le réalisateur pervertit la notion d'unité familiale et de bonheur filial. Oui, la structure est gardée coût que coûte. Oui, il faut conserver cette unité qui soude chaque membre, quitte à commettre le pire. Mais en même temps, se baser sur quelque chose d'aussi ténu que le désir d'un simple petit copain parfait pour l'héroïne, on se demande un peu comment le scénario peut vraiment tenir là-dessus.

Une des stratégies du cinéaste est d'intégrer cette relecture de la comédie anglo-saxonne 80's, largement puisée dans l'œuvre de John Hughes : premiers émois sexuels, recherche du parfait compagnon, acceptation des parents, révolte... mais dans un miroir négatif. Où le kidnapping, la torture, la privation d'éléments vitaux et le cannibalisme sont considérés comme normatifs.

Cela passe par une progression dramatique qui choisit un aspect cyclique. Le début et la fin du film se répondent en échos narratifs et visuels. Puis sur une agression visuelle qui emprunte la codification propre au genre «torture porn», avec des plans secs, durs, brutaux. Aboutissant à un modèle de crucifixion dont la victime accède directement au statut de néo-martyr d'une religion psychosexuelle du plus bel effet. Il existe un jusqu'auboutisme réjouissant dans la dernière partie. Les accidents de la vie de suivent et se ressemblent, somme toute.

Sean Byrne adopte une cohérence du beau. Une manière de conjurer la mort sociale de Lola au sein du lycée, elle y est inexistante, alors qu'elle est en fait la reine au sein de sa maison familiale. Oblitérée par une recherche de perfection indicible, où, en fait, l'inacceptable devient un mode de fonctionnement, une structuration de l'individu jusqu'au pinacle. A savoir la réunion du père et de la fille, à l'unisson – corps et âme.

THE LOVED ONES demeure un observatoire de la douleur, conduit par une peinture baroque de l'environnement. Une enfance mal gérée, non digérée car non vécue – Lola est possédée par son obsession (et Robin McLeavy possédée par le rôle !). Quitte à marcher sur des cadavres, triturer le corps, le perforer afin de lui faire perdre la raison. Aidé par une architecture multi-niveaux d'apparence simple, le design n'est en fait jamais innocent ou neutre. Durement chargée avec des conflits d'intérets, de luttes intestines. Même si les idéologies sous-tendues demeurent à priori cachées voire sous-estimées par chacun des protagonistes. Une approche fétichiste de la relation amoureuse passant par une multitude d'agressions corporelles, où la chair fournit la matière à faire aimer. L'ironie du titre masque cependant des sous intrigues agencées de manière parfois maladroite – dont les relations subséquentes des autres adolescents, amis ou autres de Brent. Où encore la corrélation ténue entre chaque événement, révélée en fin de métrage, qui dessert presque le propos principal maintenu sous pression pendant la grande partie des 84 minutes. Une surprise sadique subtilement séduisante.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
56 ans
1233 news
397 critiques Film & Vidéo
RECHERCHE
Mon compte
Se connecter

S'inscrire

Notes des lecteurs
Votez pour ce film
Vous n'êtes pas connecté !
-
0 votes
Ma note : -