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Critique du film
HYBRID 2010

 

Cette chronique de HYBRID se réfère à la vision du film en 3D, présenté au Marché du film à Cannes en 2010. La productrice du film a annoncé avant la projection qu'il ne s'agissait pas de la version définitive et que la post-production 3D restait à terminer. Quoi qu'il en soit, cela ne change pas vraiment l'aspect qualitatif du métrage.

Eric Valette est un réalisateur surprenant. Auteur d'un MALEFIQUE d'honnête facture, le voilà catapulté aux Etats-Unis pour prendre les manettes du remake de ONE MISSED CALL et donnant un film passablement laid et soporifique. Puis retour en France pour la sortie en 2009 du thriller politique UNE AFFAIRE D'ETAT avant d'embrayer sur son nouveau projet de thriller LA PROIE avec Albert Dupontel et Alice Taglioni. Ce qui ne l'a pas empêché entre-temps de s'échapper à l'étranger pour mettre une nouvelle fois la main à la pâte d'un métrage fantastique, HYBRID.

Une voiture protéiforme avale ses conducteurs et à la suite d'un accident, atterrit dans un atelier de réparation. L'atelier fermé à double tour, le véhicule va attaquer les mécaniciens et révéler sa vraie nature.

CHRISTINE, ENFER MECANIQUE, MAXIMUM OVERDRIVE, I BOUGHT A VAMPIRE MOTORCYLE, le troisième sketch de EN PLEIN CAUCHEMAR ou plus récemment MONSTER MAN et BLOOD CAR… le mythe du véhicule habité par des velléités meurtrières ne manque pas au panthéon du 7ème Art. HYBRID est un nouveau démarquage de cette idée, tentant maladroitement d'ajouter un nouveau twist : la voiture est à moitié animale. Le concept de voiture hybride ayant le vent en poupe dans notre XXIème siècle tendance écolo, voici donc que débarque la méchante voiture qui carbure au corps humain.

En parallèle de la bagnole tueuse, l'atelier est mené durement par Oded Fehr (LA MOMIE ou encore RESIDENT EVIL : APOCALYPSE et EXTINCTION) ex-GI pendant la guerre d'Irak qui tyrannise son équipe. Il se trouve confronté à sa mécanicienne de nuit (Shannon Beckner), la seule qui semble vouloir lui résister. Rien de bien neuf dans le côté des personnages et de l'exposition de leurs relations. Les deux héros se jaugent, tandis que les seconds rôles balancés à la louche (le geek, le soldat, la bimbo, etc.) jouent le remplissage et les utilités.

En fait, on se rend compte assez rapidement après ces mises en bouche qu'en plus d'une longue lignée de voitures tueuses sur grand écran, HYBRID n'est ni plus ni moins que le croisement entre UN CRI DANS L'OCEAN et P2. Certes, ça n'est pas gentil pour le film de Stephen Sommers. Mais le look de la créature lovée sous le capot, que l'on découvre assez rapidement, fait furieusement penser à celle qui hante le navire de ce très sympathique opus maritime produit en 1998. Et comme les 5/6ème du métrage se déroule dans un sous-sol fermé pour des raisons hautement stupides, seul le formidablement stupide P2 vient à l'esprit. On peut également rajouter sans problème que le final est aussi honteusement calqué sur celui d'UN CRI DANS L'OCEAN.

En étant dans un film anglo-saxon de consommation courante, le spectateur a droit à l'inévitable séquence d'explication du pourquoi du comment. Le geek de service nous donne ainsi une vague explication de mutation d'un poulpe (!?). En fait, cette justification ne sert à rien et en plus, on s'en contrefiche éperdument.

HYBRID devient alors une série B sans temps mort, mais d'une ambition limitée et d'un intérêt proche du zéro. Les dialogues fonctionnels frôlent l'épouvantable et le risible. La nature souvent caricaturale des personnages n'est certainement pas étrangère à cela. Si la première scène avec les deux teenagers débiles demeure inutile (et pourrait très bien être coupée sans que cela manque au reste du film), on pourra toutefois remercier le scénariste de nous éviter la sempiternelle fin héros/héroïne se détestant puis s'appréciant et terminant ensemble. Il choisit une autre option pour son rebondissement final, ce qui n'est pas plus mal. Mais qui rappelle curieusement celui utilisé par une autre série B, ABOMINABLE.

La plus grande satisfaction revient à l'emballage du métrage. Du premier plan aérien et spectaculaire à la manière de filmer les cascades dans l'atelier, le film ne ménage pas ses efforts afin de maintenir l'attention. Il faut certes pallier à un pitch hautement improbable et à un scénario-gruyère qui suit une formule bien usée. Mais le cinéaste sait y faire et on ne s'y ennuie guère. Un gros bémol : les effets spéciaux numériques de la bestiole n'ont rien de convaincant. Post-production inachevée ou budget insuffisant, le monstre n'est pas spécialement bien animé et incrusté dans les plans d'action. Si les spectateurs se souviennent des trucages déjà dépassés d'UN CRI DANS L'OCEAN, ceux d'HYBRID n'ont en fait guère évolué. La vision en 3D offrant surtout une considérable perte de luminosité n'aide en rien cette impression de bataille de pixels. Pour se donner une échelle de valeur, on est tout de même un cran au dessus d'un Nu Image.

Concernant la 3D, justement, seule la séquence d'ouverture avec la voiture parcourant la ville dans sa folle échappée offre un apport réel. Le reste ne semblait pas vraiment flagrant quant aux effets désirés, rien de surprenant puisque le relief a été ajouté en post-production. L'impression qui se dégage demeure donc celui d'un produit qu'on tente de faire surfer sur une juteuse mode naissante de la conversion 3D à tout va.

On ne voit pas très bien l'avenir que pourrait avoir en France HYBRID. Son cachet série B parait trop peu qualitatif pour une sortie salles mais en même temps, il aurait tout à fait sa place en bouche-trou pour une éventuelle fête du cinéma. Nul doute que les producteurs vont essayer de pousser la vente via une conversion en 3D faite un peu à la va-vite pour donner un cachet plus «cinéma» à l'ensemble. Mais même si l'on sent un certain soin et un budget plus conséquent (format Scope, scènes d'actions et de cascades parfois impressionnantes, etc.) que la grande majorité des produits vidéo, il y a de fortes chances que ce film d'Eric Valette se retrouve directement dans les rayons de supermarchés et à la télévision plutôt que sur grand écran dans nos contrées.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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