Header Critique : DEATH KAPPA

Critique du film
DEATH KAPPA 2010

 

Kanako, une starlette de la chanson à la carrière éphémère, décide de revenir vivre dans son village d'enfance qui abrite la tombe d'un «Kappa». Mais lorsqu'un groupe de jeunes ivres en voiture percutent la tombe sacrée pour l'envoyer dans l'eau, c'est la divine créature qui revient à la vie. Pendant ce temps, la petite fille d'un scientifique fou continue les expériences de son ancêtre visant à créer des soldats mutants mi-homme mi-poisson. L'explosion accidentelle d'une bombe atomique va créer une version géante d'un soldat mutant qui va dès lors détruire la ville. Heureusement, le Kappa a lui aussi muté en une créature géante pour lui mettre une bonne raclée au milieu des buildings en carton.

DEATH KAPPA est un projet extrêmement farfelu qui propose de fusionner deux sous-genres exclusifs au cinéma japonais. D'un côté, nous trouvons les «Kaiju Eiga», les films de monstres géants dont le plus connus est bien entendu GODZILLA. De l'autre, nous avons les films de «Yokais», les monstres / fantômes du folklore japonais popularisés à la fin des années 60 par la série des YOKAI MONSTERS. Un Kappa est une créature très populaire issu du vaste bestiaire des Yokais. Mi-homme, mi-tortue, mi-canard, le Kappa possède également un crâne plat qu'il doit humidifier régulièrement sous peine de disparaître. Très prisé des enfants, le Kappa est l'un des monstres stars de la série des YOKAI MONSTERS mais aussi le héros d'autres productions comme le film d'animation UN ETE AVEC COO.

La mise en scène de DEATH KAPPA est confié à un spécialiste des Kaiju et des Yokais, Tomo'o Haraguchi. L'homme travaille tout d'abord dans les effets spéciaux, on lui doit les effets de RING 0 ou encore UZUMAKI, et se fait remarquer pour son design du nouveau costume de GAMERA en 1995. Il se distingue en tant que réalisateur en signant SAKUYA : SLAYER OF DEMONS en 2000, un film revisitant la mythologie des Yokais (avec notamment Shinya Tsukamoto dans le rôle d'un homme-chat) tout en réservant l'apparition d'une sorcière géante pour le final. Il signe ensuite dans un registre similaire la série des KIBAKICHI qui suit les aventures d'un samouraï loup-garou. Produit par Fever Dreams, la société de production derrière les sanglants MACHINE GIRL et TOKYO GORE POLICE, DEATH KAPPA ne garde pourtant pas les excès gores de ces deux titres. Plus grand public, le film de Haraguchi décide en revanche de conserver l'humour parodique de la maison et de le pousser dans ses ultimes retranchements.

DEATH KAPPA est clairement découpé en trois parties assez distinctes. La première est la plus classique puisqu'elle suit la frêle Kanako (Misato Hirata, vue dans ULTRAMAN MOEBIUS) de retour au village et la résurrection du Kappa. Entrecoupée de scénettes explicatives sur le folklore japonais débitées par un professeur occidental à l'assurance douteuse, cette première partie fait la part belle aux délires narratifs. C'est ainsi que l'on découvre que notre Kappa est un fan des chansons mielleuses de Kanako, un détail qui sera bien utile lors du final. L'arrivée totalement impromptue d'une sous intrigue à base de savant fou, excuse débile pour lâcher une bombe atomique, en dit long sur la décontraction des auteurs de DEATH KAPPA, visiblement prêts à tout pour nous faire passer un moment délirant.

Le film prend une toute autre ampleur ensuite, lorsqu'il se décide à verser dans le Kaiju Eiga avec un homme poisson géant détruisant la ville. Haraguchi étant un spécialiste des effets spéciaux, on s'attend à un festival hauts de gamme à ce niveau. Et bien pas du tout. Le réalisateur joue à outrance les maquettes et les pétards simulant les explosions et s'amuse à laisser apparaître les fils transparents soutenant les avions miniatures. Les acteurs sont quant à eux intégrés dans l'image en étant re-filmés devant un vidéo projecteur, quand ils ne sont pas purement et simplement remplacés par des Big Jim enflammés. Au fur et à mesure de l'attaque du monstre, DEATH KAPPA va de plus en plus loin dans les effets bricolés (presque) n'importe comment. Le film révèle ainsi clairement son ambition de parodie du genre revisitée à la façon des films «suédés» inventés par Michel Gondry dans SOYEZ SYMPA REMBOBINEZ.

La dernière partie du film voit revenir le Kappa du titre lui aussi transformé en monstre géant. Le combat homérique l'opposant au monstre aquatique va encore faire monter l'humour d'un cran. Les empoignades entre les deux créatures sont délirantes, comme lorsque Haraguchi leur fait mimer des prises de catch ridicules entre les buildings. Le réalisateur n'oublie pas non plus ses classiques et rend hommage à la scène du rocher de EBIRAH CONTRE GODZILLA en improvisant une partie de volley ball avec des cuves sphériques posées dans le paysage. En roue libre complet, le film va même jusqu'à montrer des avions de chasse portant à notre Kappa des concombres géants (sa nourriture préférée) pour lui donner des forces durant la bagarre.

On s'attendait à visionner avec DEATH KAPPA un film délirant et gentiment Z. Quelle surprise de nous retrouver devant un monstre de parodie nonsensique complètement incontrôlable. Cela faisait longtemps que nous n'avions pas autant ri devant un spectacle si fou et convivial qu'il en devient absolument irrésistible. Le Japon est décidément un îlot de cinéma parmi les plus azimutés du monde. A l'heure où l'on se plaint de la standardisation de l'industrie cinématographique, la vision de DEATH KAPPA n'en devient que plus indispensable.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
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