Header Critique : CHEVALIER BLANC, LE (SIGFRIDO, LA LEGGENDA DEI NIBELUNGHI)

Critique du film et du DVD Zone 2
LE CHEVALIER BLANC 1957

SIGFRIDO, LA LEGGENDA DEI NIBELUNGHI 

Le cinéma italien des années 50 connaît une reconnaissance et un essor considérable. A cela, plusieurs raisons. D'abord, son cinéma social se voit couvert de récompenses dans le monde entier, avec, dans un premier temps, le néoréalisme des Visconti, Rossellini et autres De Sica, puis, par la suite, les comédies italiennes de Risi ou Monicelli. D'autre part, la Cinecitta accueille des tournages hollywoodiens prestigieux, les majors américaines souhaitant travailler en Europe où les frais sont moins chers qu'aux Etats Unis. QUO VADIS de Melvin LeRoy ou BEN-HUR DE William Wyler sont filmés à Rome pour la MGM par exemple. L'industrie italienne se met alors à produire ses propres films épiques, renouant en particulier avec sa grande tradition du péplum, tradition remontant aux années 1910. La compagnie Lux produit ainsi de luxueux spectacles en couleurs, technologie nouvelle pour ce pays, avec THEODORA, IMPERATRICE DE BYZANCE de Riccardo Freda ou ULYSSE de Mario Camerini.

Parmi ces films d'aventures, certains sont tournés avec des moyens moindres, parmi lesquels LE CHEVALIER BLANC de Giacomo Gentilomo, adaptation de la légende médiévale des Nibelungen. Sans doute ce film a-t-il été produit avec l'aide de fonds allemands. En effet, une bonne partie du casting, dont les interprètes de Siegfried, Brunhild ou Hagen, sont d'origine germanique ! Toutefois, ce long métrage est tourné en Italie, et l'on reconnaît même certains paysages qu'on reverra dans des péplums, comme cette cascade qui servira dans le royaume des amazones des TRAVAUX D'HERCULE, un an plus tard. Les comédiens du CHEVALIER BLANC ne sont alors guère connus au cinéma. La plupart vient du théâtre ou est habituée aux seconds rôles.

Recueilli enfant par Mime le forgeron, Siegfried est en fait un prince qui a hérité de la superbe épée de son père. Une fois devenu un jeune adulte, il part à l'aventure, terrasse un dragon et conquiert le somptueux trésor des Nibelungen. Il se rend ensuite au château des Burgondes, à Worm sur le Rhin, et s'éprend de Kriemhild, soeur de Gunther, le roi de ce peuple. Les succès de Siegfried provoquent des jalousies…

Malgré un titre français flou, LE CHEVALIER BLANC est bel et bien une adaptation de la légende des Nibelungen et de Siegfried, légende trouvant ses racines dans le haut moyen-âge européen et ayant été mise par écrit aux alentours du XIIème siècle dans les régions germaniques. Ce texte fut redécouvert, notamment dans l'Allemagne romantique du XIXème siècle, époque à laquelle l'on s'intéresse aux trésors du moyen-âge et l'on se passionne pour les contes et les traditions populaires. Ainsi, le compositeur d'opéra Richard Wagner s'inspire de cette légende pour sa fameuse tétralogie. Au cinéma, la plus fameuse transposition des aventures de Siegfried s'avère le fastueux diptyque des NIBELUNGEN réalisé par Fritz Lang en Allemagne : LA MORT DE SIEGFRIED et LA VENGEANCE DE KRIEMHILD, de 1924.

Avec ce CHEVALIER BLANC de 1957, nous avons affaire à une nouvelle formulation visuelle des aventures mythiques de Siegfried. Tout d'abord, le film n'est plus en 1.33, comme au temps de Fritz Lang, mais en scope, format s'étant popularisé au cours des années 50. Aux compositions massives et monumentales de Lang, Gentilomo substitue de spectaculaires vues d'ensemble et gère l'écran à la façon d'une vaste scène de théâtre. Surtout, LE CHEVALIER BLANC est en couleurs et parlant ! La nature resplendit d'une verdeur printanière, tandis qu'à la cour de Worm, le roi et sa cour se parent de costumes aux teintes éblouissantes !

Si LES NIBELUNGEN avait été essentiellement tourné dans des studios de Berlin, cette nouvelle version s'offre de très nombreux extérieurs. Les gigantesques arbres artificiels de Lang se voient remplacés par de véritables paysages de forêts et de montagnes, apportant un regard inédit sur cette aventure ponctuée par de somptueuses chevauchées dans des grands espaces, telle cette superbe séquence de chasse à cours durant laquelle les Burgondes traquent des daims et des sangliers dans une magnifique forêt !

De même, les scènes chez les Burgondes différent de celles de Fritz Lang. Celui-ci donnait à cette cour des ambiances barbares, évoquant le haut moyen-âge, celui de Charlemagne ou les traditions Vikings. Dans LE CHEVALIER BLANC, le cinéma hollywoodien des années 50 est passé par ici, avec IVANOHE, LES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDE et autres AVENTURES DE QUENTIN DUNWARD, pour ne citer que les fameuses aventures médiévales MGM dans lesquelles s'illustre l'acteur Robert Taylor. Tournois, vêtements chatoyants, ambiance galante et armures rutilantes sont ainsi au rendez-vous dans cette description d'une ère médiévale autrement plus civilisée que chez Fritz Lang ! D'ailleurs, ces scènes de cour, un peu trop statiques, paraissent, par moment, le seul réel point faible du CHEVALIER BLANC.

Malgré ces différences, certaines similitudes restent évidentes. Pour quelques scènes à effets spéciaux, les trucages et la mise en scène s'avèrent fort comparables. Le combat contre le dragon retrouve pratiquement la mise en scène de Lang et emploie à son tour un dragon mécanique grandeur nature. Malheureusement, celui du CHEVALIER BLANC est bien moins soigné que celui des NIBELUNGEN, déjà modérément crédible lui-même ! Autre passage très comparable : le défi entre Gunther et Brunehild, défi au cours duquel le roi des Burgondes se fait aider par Siegfried rendu invisible par un artefact magique…

En tout état de cause, LE CHEVALIER BLANC ne démérite pas face au chef-d'oeuvre de1924. Ce qui est déjà énorme ! On aurait pu craindre une version au rabais de cette fameuse légende, mais il n'en est rien. La mise en scène de Gentilomo s'avère à tous moments rigoureuse et élégante. L'interprétation est d'un très bon niveau. Jamais aucun personnage ou aucune séquence ne parait ridicule sans que cela ne soit dans les intentions du réalisateur. Bref, ce qui aurait pu n'être qu'un divertissement d'Heroic Fantasy sans grande envergure s'avère un très beau film d'aventures, attachant et lyrique.

Un beau film donc, mais qui est pratiquement oublié de nos jours ! Heureusement, le nouvel éditeur français Artus Films fait le pari audacieux de rééditer des longs métrages fantastiques européens rares. Dans cette première livraison, nous trouvons donc LE CHEVALIER BLANC, disponible sur un DVD double couche PAL. Livré avec le disque, nous trouvons un livret de huit pages proposant la fiche technique du film, des notes de production, et les filmographies de Giacomo Gentilomo, Ilaria Occhini (Kriemhild) et Sebastian Fischer (Siegfried).

Sur le DVD nous trouvons, en premier lieu, le film lui-même. Hélas, la copie proposée n'est pas réellement à la hauteur de ce qu'on peut attendre d'un DVD. Le film est proposé dans un format scope qui paraît parfois un peu serré, et, si la copie semble dans un état acceptable, la qualité vidéo de l'image déçoit. Absence de 16/9, définition inégale, contrastes fluctuants, voire petits pépins techniques (arrêts du son aux alentours de la 25ème minute)… Certes, il est tout de même possible de visionner cette copie confortablement, notamment grâce à une clarté agréable et à de jolies couleurs. Mais cela correspond plus aux standards d'une diffusion sur le câble qu'à ce qu'on attend d'un DVD actuellement.

La piste sonore est en mono d'origine, codée sur deux canaux dans sa version originale italienne, et elle s'avère très confortable à l'écoute, jamais fatigante malgré la présence abondante de musique orchestrale. Un sous-titrage français, très soigné dans sa traduction, est disponible.

Ce disque se distingue surtout par une interactivité soignée. Nous trouvons une galerie réunissant une affiche et deux photos d'exploitation. Ce qui fait peu, mais pour un film devenu aussi rare, on imagine sans peine que le matériel promotionnel d'époque ne doit pas se trouver aisément ! Les filmographies et la fiche technique disponibles dans le livret sont aussi sur le DVD.

De plus, nous trouvons des suppléments filmés. Le premier d'entre eux donne la parole à François Amy de la Bretèque, spécialiste du moyen âge au cinéma, qui revient en détails sur les diverses adaptations de la légende de Siegfried, la production du CHEVALIER BLANC et l'imagerie médiévale qu'il déploie. Un supplément de 25 minutes, sérieux, intéressant, mais peut-être un peu professoral dans sa forme, au vu de la diction de son intervenant. En tout cas, un supplément qui joue la carte de la qualité du contenu avant tout, et c'est là une très bonne chose !

Le second supplément donne la parole à Pascale Landes, enseignant d'histoire qui revient durant un quart d'heure sur la création de la mythologie de Siegfried, de façon exhaustive et, là aussi, sérieuse. Puis, nous allons faire un tour à Rome où nous retrouvons, dans le pittoresque décor de la boutique Profondo Rosso, le réalisateur Luigi Cozzi qui nous parle de sa rencontre avec Carlo Rambaldi, spécialiste italien des effets spéciaux dont le premier travail fut, justement, le dragon du CHEVALIER BLANC !

L'actrice Ilaria Occhini (seule intervenante ayant participé directement au film) prend la parole durant un quart d'heure. Elle ne semble pas se rappeler très précisément de ce tournage, mais, en égrenant quelques uns de ses souvenirs, elle nous fait revivre un peu de l'âge d'or du cinéma d'italien… Ce qui ne se refuse pas ! Enfin, on trouve une bande-annonce récente pour le diptyque LE BOULANGER DE L'EMPEREUR - L'EMPEREUR DU BOULANGER, qui sort aussi chez Artus films à la même date.

En fin de compte, s'il est difficile de ne pas noter des soucis au niveau de la copie, voilà tout de même un travail éditorial à encourager, d'abord pour l'intérêt réel et la rareté du film proposé, et ensuite pour l'interactivité pertinente qui l'accompagne.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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L'édition vidéo
SIGFRIDO, LA LEGGENDA DEI NIBELUNGHI DVD Zone 2 (France)
Editeur
Artus
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h36
Image
1.85 (4/3)
Audio
Italian MPEG Mono
Francais MPEG Mono
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • L'aspect médiéval dans Sigfrido (25mn)
    • La légende des Nibelungen (15mn)
    • Les effets spéciaux de Carlo Rambaldi par Luigi Cozzi (7mn)
    • Entretien avec Ilaria Occhini (15mn)
    • Galerie de photos
    • Filmographies
    • Bande-annonce de Le Boulanger de L'Empereur / L'Empereur du Boulanger
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