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Critique du film et du Blu-ray Zone B
LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN 1972

 

Le Dr Victor Frankenstein (Dennis Price) a trouvé le moyen de réanimer une créature (Fernando Bilbao) faite de différents morceaux de cadavres. Mais Cagliostro (Howard Vernon) missionne Melissa (Anne Libert), une dévorante femme-oiseau aveugle, afin de tuer Frankenstein, capturer la créature. Cagliostro souhaite l'utiliser pour ses expériences de création d'une nouvelle race. La fille du Dr, Vera (Beatriz Savon) décide de récupérer la créature.

Retitré visiblement à la hâte LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN pour son exploitation française en 1973, le titre original de LA MALEDICTION DE FRANKENSTEIN orne le générique de début. Titre mensonger qui plus est, car si expériences érotiques il y a, il faut se tourner vers Cagliostro qui s'épanche avec des vierges enchaînées et une hallucinante séquence de flagellation. Où la créature fouette Luis Barboo et Britt Nichols nus, attachés, sur un parterre dressé de pointes acérées! Et sa volonté de créer une femme parfaite afin de donner naissance à une nouvelle race. Rien de moins. Le film ressemble être une suite à DRACULA PRISONNIER DE FRANKENSTEIN, tourné quelque peu auparavant, avec quasiment le même casting, Alberto Dalbes et Daniel White compris. En fait, beaucoup de réguliers chez Franco sautent à pieds joints dans le film. Qu'il s'agisse d'acteurs ou de personnages : Howard Vernon, ici dans une stature quasi shakespearienne, Fernando Bilbao était déjà le monstre dans DRACULA PRISONNIER DE FRANKENSTEIN tout comme Luis Barboo jouant Morpho' Morpho qui est interprété ici par Jess Franco lui même. En hommage à la créature de L'HORRIBLE DR ORLOFF. Pas un hasard si on retrouve donc Mme Orloff ici, jouée par Britt Nichols, qu'on retrouvera aussi dans LA FILLE DE DRACULA, titre faisant partie de ce que certains nomment une trilogie avec LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN et DRACULA PRISONNIER DE FRANKENSTEIN. En fait, la liste de références croisées se décline à l'infini, tant les inspirations de l'auteur tournoient autour de mêmes obsessions, de modèles repris pour mieux les copier, triturer, détourner.

Franco élabore cependant un scénario plus complexe, plus ambitieux qu'à l'accoutumée. Un film en costumes, avec un quotient frénétique et délirant qui, sur une échelle de 1 à 10, atteint facilement le 69. 69, aussi, car la version française est truffée de scènes au fort potentiel érogène. Le réalisateur/scénariste élabore un bestiaire fantastique inédit fortement teinté d'ésotérisme. Il pousse sa veine fantasmagorique d'UNE VIERGE CHEZ LES MORTS VIVANTS (reprenant le même château), avec toutefois une logique narrative plus sédimentée. Ce qui ne l'empêche pas de produire des scènes à la logique qui échappe. Par exemple Vera tente de réanimer son père : celui-ci indique que l'homme à rechercher est Cagliostro. Mais malgré tout, elle le laisse tomber aussi sec, ne tentant pas de le réanimer de manière permanente. Fille ingrate !

Un étrange mélange des genres, puisant dans ses obsessions habituelles, ses zooms hasardeux, ses plans flous - avec parfois un sens du visuel positivement extraordinaire. Des plans composés de manière habile, aux multiples sources de lumière de couleurs différentes. Spectaculaires grands angles du château, magnifiés par une utilisation de la profondeur de champ. Franco, véritable pourfendeur du gout bourgeois et illuminé de l'image. Une structure de cauchemar augmenté!

L'utilisation du format Scope permet indéniablement d'apporter un plus visuel à l'ensemble. Une certaine classe nimbée de mystère, à l'instar de LA COMTESSE AUX SEINS NUS. Certes, les racines demeurent connues des aficionados. Dans son intervention, Alain Petit parle d'hommage aux monstres de la firme Universal. Un peu poussé, car le film ne garde que la créature de Frankenstein comme noyau dur pour s'en évader avec une liberté visuelle et auditive sans pareille. Ce qui reste d'autant paradoxal, car ces audaces narratives s'entrecoupent de moments incroyablement mornes. Comme ces discussions avec le policier, le Dr Seward ou l'assistante de la fille de Frankenstein. Des tunnels de dialogues sans imagination, ou passablement ridicules comme la pauvre Vera les bras ballants dans les bras de la créature lors de la scène finale. Il s'agit, probablement, ce qui caractérise cette oeuvre (et plus généralement Franco dans cette période 1970/1975), alternant le banal, le bâclé et le sublime. Et optant pour un univers abstrait toujours aussi fécond.

Artus Films étant passé à la HD, nous bénéficions de ce fait, après la parution du film aux USA chez Redemption en juillet 2015 et au Royaume Uni chez Nucleus en janvier 2018, du premier Blu ray français de Jess Franco, avec le DVD en prime. Au format respecté 2.35:1; 1080p, d'une durée complète de 74mn03 et un codage régional B. Avec un amont une minute consacrée à la collection Jess Franco du catalogue Artus Films. Le menu made in Artus a évolué vers du classieux, avec un choix plus spartiate - en effet, l'accès via les chapitres a disparu (il en existe toutefois 12).

Les gros plans éclatent à l'écran, et les détails n'ont jamais été aussi beaux. En fait, il s'avère fort probable qu'aucune autre copie ne pourra rendre le film aussi joli à voir. Des couleurs chatoyantes, le rendu argenté de la peau de la créature. Les audaces visuelles de Franco et son directeur photo s'en trouvent par ailleurs renforcées dans leur impact à l'écran. Comme ce plan américain de la créature menaçant Cagliostro, vers la 70e minute, les divers grands angles sur la plage. Certains extérieurs se révèlent toutefois fades (15mn21). En fait, on se rend compte qu'en fonction des scènes, les détails varient. A 28mn31, la texture des habits de Dennis Price est évidente, tout comme son contour de visage - et la HD prend tout son sens. Mais quand Franco donne dans le flou lors de contre-plongées (25mn20), l'image reste propre mais la notion de détail disparait. La source utilisée (un original du négatif 35mm') semble cependant en bonne condition, avec quelques poussières, laissant toutefois transparaitre l'expérience cinéma à travers un grain filmique toujours heureusement présent.

Concernant la VF, une piste non compressée LPCM 2.0 elle révèle la mise en avant des morceaux musicaux empruntés à divers compositeurs (il y en a pas moins de 4 au générique). Ce qui accroit encore plus l'aspect expérimental du long métrage. Une absence notable de souffle, avec des dialogues clairs, équilibrés et biens définis. Les cris de Melissa, perçants, tout comme le paysage audio derrière l'action transparaît de manière limpide. Le mixage est bien évidemment frontal mais offre un univers sonore très agréable. A noter la scène des coups de fouets, particulièrement réaliste et impactante sur le rendu audio.

Comme à l'habitude pour les éditions Artus concernant l'oeuvre de de Jess Franco, il s'agit d'Alain Petit, grand spécialiste du cinéaste devant l'éternel, qui vient apporter sa pierre à l'édifice . Il revient sur l'histoire du film, sa production, ses acteurs' avec des précisions très utiles sur la,musique du film et les différences entre les deux montages. L'autre segment animé par Alain Petit reste consacré au producteur Robert de Nesle, qui a lancé beaucoup de films de Jess Franco au début des années 70. Les quelques 23mn couvrent sa carrière, des origines de comédies « franchouillardes », à la distribution de films produits par d'autres. Jusqu'aux premières co-productions avec l'Italie, les peplums, les westerns... un tour d'horizon chronologique.

L'autre gros plus: la présence de la version espagnole appelée LA MALDICION DE FRANKENSTEIN (titre certes moins affriolant que son pendant français 100% exploitation!), doté de scènes supplémentaires avec Lina Romay (son premier rôle). Il s'agit d'une version excisée des scènes déshabillées présentes de la version française. A noter que ce bonus se trouve uniquement sur le Blu ray. Le film est présenté au format 2.35:1, en audio espagnol LPCM 2.0 avec sous-titres français optionnels (depuis votre télécommande) et d'une durée complète de 81mn51. Sur le papier, on pourrait croire que les 8mn de différence soient des suppléments' il n'en est rien. Ce sont des scènes additionnelles visant à remplacer les scènes érotiques expurgées. Hormis un générique ibère différent, les coupes apparaissent visibles, parfois brutales et l'introduction de scènes avec Lina Romay, une gitane nommée Esmeralda entretenant un lien mental avec Cagliostro, assez artificielle, et sans grand rapport avec l'action. Egalement, des scènes semblant provenir d'autres films (probablement DRACULA PRISONNIER DE FRANKENSTEIN). Interminables moments en foret avec Esmeralda au bord d'une rivière, zoom sur le soleil. Le résultat final s'avère un exercice parfois laborieux et longuet, le sentiment demeure que tout a été fait pour rallonger la sauce. La qualité visuelle reste cependant bien moindre que la version française, avec des noirs parfois bouchés, des couleurs passées et quelques poussières ça et là. Côté audio, quelques grésillements à prévoir sur des notes de musiques qui saturent les enceintes, mais des dialogues relativement clairs.

Le reste est complété par une succession de films annonces et extraits de longs métrages disponibles dans la collection Jess Franco de l'éditeur.

Attention enfin, une durée indiquée au verso de la jaquette sont inexactes. En effet, la durée du film sur support DVD (code région 2) est de 71mn05 (et non 77 comme précisé) et celle de la version espagnole est omise.

Vous qui pénétrerez LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN, oubliez toute objectivité. Mais vous profiterez d'un bel effort éditorial mettant en avant un film à part dans la filmographie de Jess Franco - et une HD qui vaut clairement le détour.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
56 ans
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L'abstraite veine poético-macabro de Jess Franco
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La version espagnole, trop longuette
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L'édition vidéo
LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN Blu-ray Zone B (France)
Editeur
Artus
Support
Blu-Ray (Double couche)
Origine
France (Zone B)
Date de Sortie
Durée
1h11
Image
2.35 (16/9)
Audio
Spanish L PCM Mono
Francais L PCM Mono
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • La Malédiction de Frankenstein par Alain Petit (30mn33 - VF - HD)
    • Robert de Nesle par Alain Petit (23mn12 - VF - HD)
    • Version espagnole LA MALDICION DE FRANKENSTEIN (81mn51)
    • Film annonce LES EXPERIENCES EROTIQUES DE FRANKENSTEIN (3mn21 - VF)
    • Film annonce VENUS IN FURS (2mn43 VO)
    • Film annonce LES INASSOUVIES (3mn14 VO)
    • Film annonce LES DEMONS (3mn17 - VO)
    • Extrait PLAISIR A 3 (1mn14)
    • Extrait CELESTINE BONNE A TOUT FAIRE (2mn)
    • Extrait LA COMTESSE PERVERSE (1mn35)
    • Extrait SUMURU LA CITE SANS HOMMES (1mn45)
    • Extrait TENDER FLESH (1mn13)
    • Extrait LA FILLE DE DRACULA (1mn54)
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