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Critique du film
IT FOLLOWS 2014

 

Beaucoup de Buzz pour pas grand chose. IT FOLLOWS est auréolé de sa présentation cannoise en 2014, de passages en festivals… jusqu'à celui de Gérardmer en compétition. On suit donc l'histoire de cette jeune femme poursuivie par une entité invisible, matérialisée par des inconnus (ou pas) qui marchent vers elle.

Le film part d'une bonne idée pour ressembler en fait à un compendium meta de plusieurs concepts bien usés. Le cinéaste connait ses classiques bis. Le jeune geek regarde à la télévision LA PLANETE DES TEMPETES - extraits montrés de manière appuyés!- et KILLERS FROM SPACE avec Peter Graves. La cool attitude, quoi. Et pour la structure du film-même : De RENDEZ-VOUS AVEC LA PEUR pour le passage de relais du mal, via L'EMPRISE pour l'agression invisible et le ressort narratif du « vous ne me croyez pas mais j'vous jure que c'est vrai » et bien sûr LES GRIFFES DE LA NUIT pour le néo-croquemitaine 2.0 du XXIe siècle… le méchant invisible de IT FOLLOWS repose sur des greffons d'idées passées. Sans parler d'un mise en images (et en musique) qui hurle son amour pour John Carpenter et singeant les banlieues proprettes et les protagonistes d'HALLOWEEN. L'enfumage/emballage proto-Sundance fonctionne cependant assez mal. Il ne fait que reprendre des formules bien huilées sans y apporter une once de sang neuf. En y incorporant un look élégant en Scope qui fait tout pour éviter son rattachement au film de genre. Idéal pour une sélection en festival - et cela fonctionna plutôt bien aux vues de ses diverses participations.

Le film débute de manière efficace avec une séquence initiale punchy, agréablement filmée, et idéalement éclairée. Avec un plan sauvage, brisant et qui fait mal. Le cinéaste a donc retenu la leçon que pour lancer un film et plaire aux acheteurs potentiels qui ne restent que trop peu de temps dans une salle lors des marchés, il faut une scène choc en premier. Pari gagné, avant la torpeur de l'exposition des personnages principaux de l'histoire.

Ajouter à cela un casting jeune pour plaire au public ciblé : ils sont tous beaux, jeunes, de classe moyenne mais PAS de la banlieue de Détroit (ce serait pas assez vendeur). On tente donc vaguement de nous faire passer un message social sur les ravages de la crise automobile dans des passages de la banlieue de détroit ravagée. Bonne conscience, quand tu nous tiens. Il aurait été autrement plus audacieux de faire justement des héros défavorisés le centre de l'histoire. Manqué. Il faudra rajouter à cela une bonne dose de puritanisme américain bon teint : le mal se transmet lors d'une relation sexuelle mais surtout on se couvre bien d'un drap avant de passer aux choses sérieuses. Même quand on va aux putes.

La mise en scène aligne ensuite des éléments qui pataugent dans une incohérence poussive. Alors que l'héroïne reste seule à voir l'entité la suivre, voilà-t-y pas que finalement, non, ses potes aussi. Via une scène ridicule sur une plage, avec la chevelure tirée en l'air par la force invisible et soudain: miracle, il y'a quelque chose dans l'air et c'est pas de l'amour. L'amoureux transi expulsé violemment sur la gauche de l'écran. Ceci avec un effet numérique de la pire espèce. Pourquoi? Réponse imparable des auteurs : parce que. Idem avec une autre scène, rappelant par ailleurs LA FELINE version Tourneur. La menace invisible qui balance des instrument électriques branchés dans l'eau… mais qui n'électrocutent en rien la personne se trouvant submergée. Pourquoi? Parce que. Ah bon.

Afin de ponctuer les éléments de tension graduelle, rien de mieux que la bande son qui grimpe elle aussi petit à petit. Booster les enceintes d'un son pétaradant qui bien guider le spectateur dans la peur qu'il doit ressentir. Mais voilà : ne refait pas HALLOWEEN qui veut. Et là, le film se prend les pieds dans le tapis. Généralement, les cinéastes en panne d'idées se rattrapent aux décibels pour provoquer une gentille trouille PG-13 aux spectateurs avides de sensations (pas trop) fortes. Tout en trouvant le support des stéréotypes habituels du film de genre pour ados (l'inévitable orage final avec tonnerre et éclairs menaçants. On y a droit ici aussi). On tombe dans la bonne moyenne avec IT FOLLOWS. Le tout faisant fi de la logique que le récit tente d'imprimer depuis la séquence initiale. Et ce n'est pas à travers le charisme tout mou de Maika Monroe, sorte de jumelle de Chloë Savigny en mode moue boudeuse/je fais la gueule - voir les séquences sur la plage, révélatrices-. Sa soit-disante impuissance face à cette menace pas si invisible que cela devient agaçante. On conseille vivement de revoir la scène de la morgue dans THE FOG où dans un seul et même plan, Carpenter réussit à faire naître l'angoisse et la peur montante tout en montrant à la fois l'héroïne et la menace qui la guette. Rien de tout cela ici.

Etonnant qu'il puisse bénéficier d'une telle aura positive avec les casseroles qu'il se traine. IT FOLLOWS ou la hype festivalière branchouille à son paroxysme. Son Grand Prix décerné par le jury du festival de Gérardmer 2015 tombe pile poil pour un film qui aura du mal à survivre au milieu des quelques 15 films qui sortiront le même jour. Sous son habillage trendy et filmé par un cinéaste qui fait son petit malin, IT FOLLOWS n'est ni plus, ni moins qu'un slasher à la con, bourré de poudre aux yeux. Dépourvu de tout sang et de tout enjeu.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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