Header Critique : JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER (JESSE JAMES CONTRE FRANKENSTEIN)

Critique du film et du DVD Zone 1
JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER 1966

JESSE JAMES CONTRE FRANKENSTEIN 

Il y a presque 50 ans, se terminait la carrière d'un réalisateur aujourd'hui pratiquement oublié. William Beaudine a commencé avec Mack Sennett et David Griffith, connu le cinéma muet, tourné avec Mary Pickford - une des mégastars des années 20. Egalmement célèbre via le sobriquet de «One Shot Beaudine», car réputé pour ne tourner qu'une seule prise ! Il a enchainé avec toutes sortes de films, séries B, serials... plus de 250 métrages et des kilomètres de séries TV. Véritable stakhanoviste de la péloche, il achève sa carrière cinématographique avec un curieux mélange : western et horreur. Ce JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER est son chant du cygne, et sorti en double programme aux USA avec une autre curiosité de Beaudine, BILLY THE KID Vs DRACULA.

Jesse James (John Lupton) est poursuivi par le Marshall du coin. Voulant attaquer un convoi son compère Hank (Cal Bolder) est cependant blessé. Sous les conseils de Juanita (Estelita Rodriguez), ils arrivent chez les Dr Maria Et Rudolph Frankenstein (Narda Onyx et Steven Geray) dont les expériences ont fait disparaître nombre d'habitants du coin.

Tourné en 8 jours pour une somme dérisoire en Californie, William Beaudine mélange deux genres distincts. Le film d'horreur qu'il connaît bien, ayant par le passé tourné entre dizaines THE APE MAN ou encore VOODOO MAN avec Bela Lugosi. Et également le Western, genre qu'il aura visité de nombreuses reprises comme BORN TO THE SADDLE, en Cinecolor avec Leif Erickson, SUR LA PISTE DE L'OREGON pour Walt Disney Productions mais ayant surtout tourné la série TV sur Wild Bill Hickok avec Guy Madison.

Un casting plutôt curieux complète le tableau. L'actrice cubaine Estelita Rodriguez, renommée sous son seul prénom d'Estelita, était promise à une jolie carrière. Habituée des seconds rôles de mexicaine ou de chaude latino, elle donne la réplique à Jim Davis dans LA RUEE VERS LA CALIFORNIE mais c'est CUBAN FIREBALL de William Beaudine en 1951 qui la lance comme la nouvelle bomba latina. Qui tente de remplacer les Lupe Velez (surnommée «Mexican Spitfire») et autres Carmen Miranda dont les carrières étaient terminées ou presque. Elle enchaina les westerns avec Roy Rogers et grimpa jusqu'au RIO RAVO d'Howard Hawks. Curieusement, sa carrière stagna alors et JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER fut son dernier film. Elle mourut mystérieusement quelques semaines après la sortie du film. On trouve également ici Jim Davis dans le rôle du sheriff. Les amateurs éclairés se souviennent du JOUR DE LA FIN DES TEMPS de John Bud Cardos mais également dans son rôle de Jock Ewing de la série DALLAS. Enfin, le projecteur doit se braquer sur l'actrice estonnienne Narda Onyx, dans le rôle de la diabolique héritière Frankenstein. Elle surjoue à mort, écarquille les yeux, complote et met un casque multicolore sur la tête, car elle est très méchante. En fait, c'est juste pour que cette illustre inconnue ait sa ligne de gloire dans la chronique. Ce fut pour elle aussi son dernier rôle. Quand on la voit jouer, on se dit qu'il y a une justice, quelque part.

Contrairement à ce que le titre indique («Jesse James rencontre la Fille de Frankenstein»), Jesse James rencontre... la petite fille de Frankenstein. Non pas que cela change grand chose au métrage. Mais il ajoute au charme suranné que représente ce morceau de cinéma exhumé d'un autre monde. Car JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER semble venir d'ailleurs, nostalgique des serials tournés à toute vitesse, avec des dialogues passés, au jeu (trop) appuyé des acteurs et actrices, aux rebondissements déjà hors sujet avant même d'être à l'image. William Beaudine semblait imperméable aux changements de style, de ton et de mise en image que les années 60 apportaient au cinéma de genre et à la série B. Un ton «à l'ancienne» combiné à un budget infinitésimal ne peut hélas faire place à un miracle.

Le seul détail qui fasse décoller le film reste la composition de Raoul Kraushaar. Le nom ne vous dira pas grand chose non plus. Et pourtant, ce français émigré aux USA composa plus de 120 partitions de films et devint l'un des conducteurs de musique les plus réputés d'Hollywood. Principalement de la série B voire C ou D, pas mal d'Abbott et Costello, énormément de TV mais surtout LA FEMME AU GARDENIA de Fritz Lang et LES ENVAHISSEURS DE LA PLANETE ROUGE de William Cameron Menzies... et jusqu'à la coordination musicale de CABARET. JESSE JAMES MEETS FRANLENSTEIN'S DAUGHTER : un vrai carrefour de talents, on vous dit.

Car entre ces scories, les décors malheureux, la caméra qui essaye de ne pas déborder du cadre limité, l'histoire présente des incohérences assez spectaculaires. William Beaudine avait beau ne faire qu'une seule scène et ne jamais la reprendre, les plans trahissent quelques erreurs de continuités. Pour donner le change, la narration tente désespérément de verser dans le serial. Beaucoup de rebondissements, de méchants traitres qui retournent leur veste, de pauvres émigrés qu'on maltraite, d'étrangers venus s'installer aux US «parce qu'il y a de magnifiques orages électriques», de château malfaisant sur la colline, de cavalcades... On reste coincé dans un univers très petit. Ce n'est pas le manque d'ambition qui tue le film. Mais le délire manque de souffle, d'argent et de talent.

Le traitement bicéphale penche pour le western en grand majorité. Réutilisation de décors existants (la ville fantôme où l'équipe a du tourner au petit matin à la sauvette !), dialogues entre cowboys, gunfights, tout y est. Beaucoup de dialogues, d'ailleurs. Beaucoup. Mais vraiment. Si bien que le côté horrifique se retrouve avec une portion congrue. Comme le film demeure assez inepte, les moyens du bord jouent pour les effets spéciaux. A minima, ils se limitent à la cicatrice au tour du crâne de la créature. Pas de sang, pas de membres découpés, pas d'atmosphère horrifique, pas de frissons, juste une idée balancée à la va-vite. Car la totale mégalomanie et égocentrique Maria Frankenstein veut simplement transplanter un cerveau baignant dans son jus laissé par pépé dans le corps d'une victime. Pour ensuite le contrôler! Pourquoi ? On ne sait pas ! On s'en fout ! Le scénario s'en fout ! Le film s'en fout !

A noter pour le fun que le film réutilise le matériel qu'Universal avait alloué aux tournages du FILS DE FRANKENSTEIN et du SPECTRE DE FRANKENSTEIN... et qu'on reverra dans la parodie de Mel Brooks ! On les voit certes en couleurs, mais le tout fait pitié à voir. Et le reste des effets supposés fait comprendre l'extrême avancée des scientifiques, c'est la rigolade assurée avec le casque à ondes magnétiques !

JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER va à la fois enrager, lasser, ennuyer ou réjouir le spectateur en fonction de son humeur, de ses attentes et de son état physique et mental. William Beaudine tente un pari impossible, renouer avec ce qui fit son succès quelques années auparavant. Mais le savoir-faire ne sauve en rien un film obsolète. Le concept était excitant, sa mise en image pauvrissime. Mais quelque part, ce témoin malgré lui d'un âge du cinéma qui s'éteint garde un certain charme mélancolique, même s'il demeure poussiéreux.

Le DVD Alpha toutes zones offre le film dans une version plein cadre (et donc 4/3), alors qu'il fut sorti quelques années après chez Elite dans sa version 1.85:1 d'origine. Les couleurs accusent le nombre des années : un peu délavées, mais le master fourni provient apparemment de la télévision US. Néanmoins, si l'on omet les quelques poussières blanches et noires qui surgissent à intervalles régulier, l'ensemble reste relativement propre. Pas d'exigence à avoir, on reste sur un produit d'origine emballé à la va-vite. Si bien que le rendu final reste médiocre, la définition frise le flou par moments, possède de nombreux effets de peigne, avec une bande floutée sur le bas de l'écran... mais toutefois visible. La piste anglaise Dolby Digital mono sur deux canaux est enregistrée de manière assez basse, avec pas mal de parasites sonores. Anglophile, réjouis-toi, cette piste est à toi. Francophile, maudis-toi : des sous-titres, il n'y en a pas.

Y'a-t-il un cadeau bonus ? Pas vraiment. Si l'on excepte la catalogue Alpha qui fait défiler les jaquettes et deux films annonce de films d'horreur indés assez laids, il n'y a rien de bien recommandable.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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L'édition vidéo
JESSE JAMES MEETS FRANKENSTEIN'S DAUGHTER DVD Zone 1 (USA)
Editeur
Gotham
Support
DVD (Simple couche)
Origine
USA (Zone 1)
Date de Sortie
Durée
1h23
Image
1.33 (4/3)
Audio
English Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Aucun
  • Supplements
      • Films annonce
      • BLOOD OF THE BEAST (1mn38)
      • THE ROOMATE (3mn20)
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