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Critique du film
THE DARKEST HOUR 2011

 

Comment faire un film qui soit suffisamment pertinent pour percer le marché russe tout en assurant une couverture maximum à des sponsors aussi connus tels qu'une marque de fast food américain commençant par "M" et des cafés insipides qui commencent par "S" ? Réponse : en regardant THE DARKEST HOUR ! Enième attaque d'extra-terrestres belliqueux qui décident cette fois-ci d'attaquer Moscou. Parce que c'est aussi bien que le Nevada, et qu'on n'a pas à mettre de l'aluminium sur la tête pour se faire passer pour des débiles.

Le film annonce laissait toutefois présager une approche originale sur un canevas archi-classique. Las. Après un générique plutôt réussi, on s'enfonce dans des clichés de première robustesse. Soit deux jeunes prodiges du web (Max Minghella et Emile Hirsch) qui viennent profiter de la manne financière soviétique pour un réseau social über-cool. Vendu par leur pote Joel Kinnaman (ah ! les méchants suédois !), ils terminent dans une boite super branchée et draguent Oliva Thirby et Rachael Taylor – dans l'ordre un top-model (bien sûr) et son assistante moche mais avec un grand cœur. Ca boit, ça danse, ça démoule. Et bang : des aliens dans ta face et la ville est sens dessus-dessous.

Un bon soupir avec la blonde idiote, le suédois pleutre et les péripéties à la con qui défient l'imagination... On a surtout l'impression qu'un concept a été couché sur le papier : des aliens belliqueux qui aspirent l'énergie humaine de manière spectaculaire, jusqu'à nous laisser en poussière. Et le reste, ben... la formule ressert la soupe du groupe d'humains qui survit à travers une ville en proie aux méchants. Interchangeable, puisqu'en remplaçant aliens par morts-vivants, contaminés ou fantômes, on obtient une bonne centaine de métrages pondus depuis une décennie. Le plus récent, et bien plus excitant, exemple : SKYLINE. Il faut donc maintenant tenir une heure et demie.

Petite originalité (petite, hein) : l'action se déroule à Moscou. Pour une fois, ce n'est donc pas sur le territoire américain que l'invasion déboule. Le cinéaste fait ses armes obligées de ballade touristique pour vanter les mérites de la capitale russe. Tout est comme ailleurs. Il y a du fast food, du clubbing, du café dégueulasse, des voitures, mais aussi la place Rouge, le joli métro, le vieux magasin Goum maintenant dédié au luxe, la place Rouge, des voitures et la place Rouge. Et tout est fait pour glorifier la mère patrie : guerriers à l'ancienne, ingénierie russe, beautés locales, courage, résistance pour le pays nourricier... que du bon. On se croirait presque dans une propagande locale. Merci Timur Bekmanbetov d'avoir chapeauté le projet : le film a pu s'assurer une sortie digne de ce nom sur le territoire russe, même si les résultats furent en demi-teinte. Le final indique par ailleurs clairement une volonté de déclencher une franchise : les résultats décevants à travers le monde laisseront une telle velléité sur le carreau. Heureusement !

Côté technique, c'est mi-figue mi-raisin. Les attaques des extra-terrestres surprennent et la première se veut brutale, sans concession, révélant la psychologie de chacun des survivants. Une belle entrée en matière. Après... on sent que les graphistes numériques s'en sont donnés à cœur joie pour introduire qui un avion dans le Goum, des colonnes de fumées montrant l'extraction des minerais car le sol russe est très riche, nous fait-on remarquer. Il faudra passer sur des incrustations généralement médiocres, des aliens une fois révélés passablement ridicules pour le peu qu'on en voie. Stephen Fangmeier, qui fit les effets spéciaux de WANTED et réalisa ERAGON, n'a pas donné le meilleur de lui-même à ce niveau.

Après, le scénario patine méchamment et cherche à rallonger la sauce pour obtenir les 90 minutes réglementaires. Des incohérences patentes parasitent la progression du groupe. Ainsi les deux héros se réfugient sous une voiture pour échapper à un alien en plein milieu de la place rouge désertée. Ils s'en sortent. Mais le méchant suédois poursuivi dans une file de voitures ne bénéficie même pas des conseils des deux vaillants héros pour faire de même et se fait dézinguer comme un bleu. Une écriture hésitante, des séquences d'actions raccrochées n'importe comment aux wagons, aucune émotion particulière hormis des morceaux de bravoure technique assemblés à la va-z-y-comme-j'te-pousse, poussés par une partition gargouillante là aussi peu originale de Tyler Bates.

En fait, entre des personnages inintéressants, la romance à deux roubles, les rebondissements archi-courus d'avance, le film oscille entre cheap et longuet. Les scènes finales ressemblent à un post nuke italien tourné dans les terrains vagues napolitains, mâtiné d'Albert Pyun version 90's en pleine Slovaquie dévastée. Et il se dégage un air de médiocrité générale. Un film bricolé à la va-vite pour fournir aux salles de la pâtée prédigérée pour public peu demandeur. Triste, car le film avait un certain potentiel au départ. Et le réalisateur, ancien directeur artistique de FIGHT CLUB et auteur du sympathique RIGHT AT YOUR DOOR ne peut pas grand-chose, ne parvenant à aucun moment à insuffler du rythme ou un quelconque souffle de vie.

THE DARKEST HOUR reste par ailleurs doté d'une 3D assez laide. La projection à laquelle nous avons assisté n'aide en rien à apprécier le film sous ce format, qui semble passablement inutile. On atteint des sommets de crasse technique à la PIRANHA 3D, mais pour un film tourné en 3D native, on est loin du compte. Une série B qui ne dépasse pas son statut de DTV de luxe et ne provoque aucun frisson. Une action inintéressante et qui ne rime à rien. L'équipe de production et le réalisateur ont trop vu de films d'invasions extra-terrestres et persistent à montrer qu'ils sont au-dessus de tout cela. C'est un peu nous prendre pour des idiots. En clair : au-delà de 16 ans, passez votre chemin !

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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