3. Interview - Partie 2

DeVilDead : Vous avez mis en boite GAME OF THE DEAD durant l'été 2008. Peux-tu nous dire quel investissement, en terme de temps, ont réellement demandés les phases de production, tournage et post-prod ?

Nicolas Hugon : En fait, à partir du moment où on a repris cette idée avec Hugo, je me suis très vite mis à scénariser un minimum la chose, à placer l'histoire au sein d'une ambiance "fin du monde" puis à faire un découpage de chaque plan. Ensuite, j'ai motivé les troupes, Choko s'est attaqué au story-board et on a décidé de tourner dans la maison de sa grand-mère qui devait être détruite dans les mois à venir.
On a investi les lieux, Hugo et Livia sont restés sur place durant deux mois pour préparer les décors et les effets gores, aidés par le reste de l'équipe. Le tournage s'est étalé sur deux week-ends et la post-prod a pris quatre mois.

En terme de budget maintenant, ça représente quelle somme un court comme GAME OF THE DEAD ?

Comme nous n'avons fait aucune démarche pour obtenir des subventions, j'ai totalement auto-financé GAME OF THE DEAD.
Je n'ai pas de chiffre exact en tête car j'ai tout acheté au fur et à mesure. Ça comprend la bouffe, parce que comme les décorateurs ont vécu deux mois sur les lieux du tournage, je faisais les courses pour eux. Il y a eu aussi un important budget en plâtre, enduit, peinture… Mais dans l'ensemble on a fait beaucoup de récup' et on a eu la chance de trouver un bar tout près de chez nous qui fermait ses portes. On a pu récupérer d'authentiques banquettes de bistrot, du lambris et tout un tas de petites choses qui donnent un aspect réel à notre bar, qui était à l'origine un garage. Il y a eu aussi un investissement pour les maquillages qui ont été fait par Nicolas Flipo, un professionnel qui a travaillé sur LA HORDE en tant qu'accessoiriste.
En faisant une estimation, je pense que le film m'a coûté aux alentours de 2000 euros.

Bière incluse?

Ah non, je n'ai pas payé l'alcool ! Mais ça, les acteurs s'en sont chargés…

Le making-of du film, disponible sur le site officiel, est révélateur d'une ambiance plutôt décontractée sur le lieu du tournage...

Sur le plateau, l'ambiance était plutôt sérieuse, mais c'est vrai qu'entre les prises, c'était l'apéro toute la journée pour les acteurs, et ils se sont défoulés comme ils pouvaient ! J'ai eu un peu peur sur le coup mais au final, je pense que leur état d'ébriété avancée a pas mal contribué à l'attitude des zombies !

Outre l'aspect bon enfant qui ressort du documentaire, on aperçoit également de nombreux moulages et notamment quelques têtes, ou plutôt demies têtes factices. Au sein du court, le résultat est réellement bluffant...Vous avez réalisé ça par vos propres moyens, à la Peter Jackson, dans le four familial ? Vous aviez déjà de l'expérience dans le domaine ?

Comme je le disais, ça a été un test, nous n'avions aucune expérience dans ce domaine, et les responsables des effets spéciaux ont fait des merveilles avec des moyens artisanaux. C'est fou la quantité de plâtre qu'on a utilisé. Je crois que ça avoisine les 200 kilos ! Comme on apprenait en même temps, ça a pris beaucoup de temps et nous n'avions pas de four, on faisait sécher les moulages au soleil ! En fait, Hugo avait juste bouquiné un livre sur les techniques de moulage. Donc il savait à peu près ce qui l'attendait, mais moi je ne pensais pas que c'était une telle galère entre les temps de séchage, les moules négatifs, positifs... Bref je pense que pour tout le monde, ça a été une bonne école.

De la même manière, vous avez recours au numérique pour certains plans. L'un d'entre vous est infographiste de formation ou c'est encore là le fruit d'un travail de longue haleine ?

Je voulais vraiment un aspect film à l'ancienne, nous avons donc utilisé le numérique seulement pour mélanger différentes prises de vues. En fait, nous n'avons rien créé numériquement. Je ne voulais pas de sang créé par ordinateur ou de bouts de cervelle en 3D donc tout ce qu'on voit est "réel". Comme nous n'avions jamais fait de tels effets auparavant, nous n'étions même pas sûr que cela fonctionnerait, j'avais juste l'idée en tête... Et encore une fois, ce n'est pas un infographiste professionnel qui s'est occupé du compositing mais juste Yoan, un monteur de profession, qui faisait alors ces premiers pas sur le logiciel After Effects. Dans l'ensemble, je dirai qu'on a réussi à obtenir ce qu'on souhaitait.

Toujours concernant les trucages et autres effets de maquillages, qui sont tout de même nombreux et fort bien conçus, quel à été le plus délicat à réaliser ?

Le plan qui a demandé le plus de temps est le tout premier du film. Lorsqu'on voit l'aspect extérieur du bar. C'est une maquette qui a été construite après le tournage par Hugo et Livia, mon couple de décorateurs. Les pauvres, après les avoir séquestrés pendant deux mois dans le décor, je leur ai encore pris deux mois de leur temps pour construire cette maquette ! Ils l'ont fait dans leur chambre, et le tout prenait tellement de place qu'ils pouvaient à peine bouger ! Bref, encore une fois, ils ont fait preuve d'une grande patience et se sont donnés à fond, pour un plan que je voulais absolument et qui est mon préféré du film ! On l'a filmé devant un fond bleu sur un skateboard pour le mouvement de travelling avant, puis on l'a intégré dans un décor post-apocalyptique, créé à partir de photos de bâtiments en ruine et d'un ciel qu'on a tout simplement coloré dans les tons orange.

J'évoquais tout à l'heure Peter Jackson et ce n'était pas totalement innocent. GAME OF THE DEAD fait preuve d'un humour assez décalé que l'on pourrait rapprocher de celui du bonhomme. Le seul personnage vivant de ton film m'a d'ailleurs fait penser au curé dans BRAINDEAD, lequel balançait un très solennel "Au nom du seigneur, je vous botte le cul" avant de décimer du zombie. Doit on y voir un clin d'oeil ?

Ce personnage est justement le "Toughest" que j'évoquais tout à l'heure et qui est assez récurrent chez GoreGarden. Même si personne ne le connaît vraiment, le voulais qu'il fasse un caméo dans le film… Reste que l'arrivée de ce personnage m'a beaucoup été reprochée, on m'a même dit que ça gâchait le film. Mais je trouvais l'idée de départ et la chute insuffisante, j'avais besoin d'un élément perturbateur pour foutre le bordel dans cette scène. Le clin d'œil dont tu parles n'a pas été volontaire au départ mais je me suis vite aperçu de la ressemblance avec l'arrivée du curé dans BRAINDEAD. Ça a été fait de manière inconsciente mais on peut tout de même dire qu'il s'agit d'un clin d'œil, BRAINDEAD étant l'un de ces films qui a marqué ma jeunesse !

Doit-on voir d'autres références ou peut-être d'autres sources d'inspiration au sein de GAME OF THE DEAD ?

J'ai bouffé du film fantastique pendant des années et je pense que, en quelques sortes, j'ai condensé dans ces cinq minutes tout ce qui m'avait marqué dans ce cinéma. Pour les lumières, l'image, je voulais au maximum me rapprocher d'un rendu à la EVIL DEAD avec ce grain si particulier. Après, il y a plein de références inconscientes. La plus marquante est quand, récemment, j'ai revu ROBOCOP et que je me suis aperçu que j'avais, sans l'avoir voulu, complètement pompé le plan où le Robocop entre dans le hangar des trafiquants de drogue. On a alors ce plan en contre-plongée, de la porte qui s'écroule, laissant apparaître la silhouette du cyber-flic un peu à la façon d'une apparition divine, avec de la fumée et une lumière blanche…
Sinon, comme tu le disais tout à l'heure, l'humour un peu cartoon, ça doit être parce que j'ai trop regardé de EVIL DEAD et de BRAINDEAD durant mes jeunes années !

RECHERCHE
Mon compte
Se connecter

S'inscrire

Index
Dossier réalisé par
Xavier Desbarats
Remerciements
Nicolas Hugon & GoreGarden