2. Interview Blackaria

Durant le festival, une partie de l'équipe du film BLACKARIA avait fait le déplacement. Nous avons ainsi pu discuter avec François Gaillard (réalisateur), Christophe Robin (réalisateur) & Clara Vallet (comédienne).

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs qui vous découvre sûrement avec BLACKARIA ?

François : Mon nom est François Gaillard. BLACKARIA est mon quatrième long métrage. Je l'ai réalisé avec Christophe et c'est ma première coréalisation. Avant, j'ai réalisé un premier film qui s'appelle I AM THE RIPPER sous le pseudonyme d'Eric Anderson, parce que le film est très, très mauvais. J'ai réalisé un deuxième film, sous le pseudonyme de François Merlin, qui s'appelle WITCHING HOUR parce que le film est très mauvais tout court, et j'ai réalisé un troisième film sous mon vrai nom, parce que le film est moyen et ça s'appelle WELCOME TO MY NIGHTMARE. Les deux premiers films ont été distribués en DVD par une boîte anglaise qui s'appelle "Redemption Films". Le troisième film pour le moment n'a pas de distributeur, je ne sais pas si un jour j'en ferais quelque chose. Entre temps, j'ai réalisé un court métrage, où Clara avait un petit rôle. Elle a fait preuve d'un certain courage vu qu'elle devait jouer avec un serpent. Forcément, ça nous a mis en confiance, ça nous a permis de travailler ensemble sur BLACKARIA.

Christophe : J'ai déjà fait des réalisations, mais tout seul. Ce n'était que des courts métrages, j'ai essayé plusieurs genres, de la comédie sentimentale aux films oniriques, des films satiriques mélangeant documentaire et fiction. Là, c'est mon premier long métrage, en coréalisation avec François et je suis en préparation de court métrage, seul, dans le domaine du fantastique. Parce que maintenant, grâce à François et son équipe (NDLR : regroupé sous une association du nom de Schools' Out), j'ai découvert que le fantastique c'était, quelque part, ma voie.

Clara : J'ai rencontré Christophe et François par l'intermédiaire d'un ami. Je viens du milieu de l'opéra à la base, ça fait 9 ans que j'y travaille. Ca m'a permis d'apprendre à jouer la comédie parce que c'est un art qui regroupe beaucoup d'autres arts : la musique, les arts plastiques, la danse, le théâtre, c'est très complet.

Comment est né BLACKARIA ?

François : En fait, avant BLACKARIA ne portait pas ce titre là. Nous avons tourné, il y a maintenant deux ans, un court métrage qui s'appelait SNOW BLIND et qui était, on va dire, le squelette de BLACKARIA. Le rôle de Clara, à l'époque, était tenu par Aurélie Godefroy, qui joue la tueuse en manteau rouge. Le tournage était très pénible, vraiment très pénible, c'est peut-être un des pires que j'ai jamais faits. Par contre, je sentais qu'il y avait quelque chose. Nous avions fait une maquette de la scène de l'ascenseur et nous savions qu'il y avait quelque chose à en tirer. Simplement, il fallait absolument repartir à zéro et le refaire. Donc on a retourné ce qui est devenu BLACKARIA, en coréalisation avec Christophe. Le film devait être un court métrage destiné à rejoindre une anthologie appellé 3 HITS FROM HELL. Et finalement, notre collaboration avec la directrice de la photo Anna Naigeon et le maquilleur David Scherer nous ont poussés à en faire un long métrage. Eux-mêmes nous ont dit qu'il y avait une très bonne matière. Et que le film, de toute façon, serait plus long que la durée limite d'un court-métrage. De plus, l'attrait de la part du festival de Sainte Maxime nous a motivés pour en faire un long et pour le présenter en temps et en heure au festival.

Le film est très marqué par le Giallo. Quelles ont été vos références ?

François : En fait, si je devais résumer l'influence, c'est européen. Beaucoup de jeunes réalisateurs français, tous très talentueux, sont très influencés par Spielberg ou Cameron. Moi, ma sensibilité fait que je suis plus touché par Polanski, Fulci, Argento, Zulawski, Henri Verneuil... Quelques américains aussi comme Don Siegel. Mais moi, ce qui me touche aussi, c'est cet héritage européen qui, finalement, n'est pas exploité. Il y avait un film qui était le mètre étalon pour BLACKARIA, j'en avais beaucoup parlé à Christophe et je lui ai montré, c'est LE VENIN DE LA PEUR de Lucio Fulci, qui pour moi est un chef d'œuvre d'expérimentation et d'érotisme. La première scène érotique est absolument torride, elle est magnifique.

Christophe : Tout ce qui était l'esthétique même du film, c'est François qui l'a apporté. Moi, je m'occupait de la direction d'acteurs. Après, tout ce qui était direction artistique, je n'avais rien à redire, parce que, quelque part je comprenais la vision de François et j'apprécie sa vision. Moi j'étais dans une situation, j'étais conquis.

Clara, le film te demande des choses pas vraiment simples. Il y a beaucoup d'érotisme, de la nudité, pas mal de scènes horrifiques aussi. Comment tu as vécus ça ?

Clara : Je n'ai jamais eu d'expériences cinématographiques, je viens plutôt du théâtre, donc c'était vraiment quelque chose d'assez fascinant et un challenge. Ce n'était que du plaisir, même si on a eu des moments difficiles parce que c'était tourné avec nos faibles moyens. Par rapport à la nudité, c'est une question de relation, de confiance avec les personnes avec qui tu travailles. Si j'étais avec deux zigotos qui n'en auraient eu rien à faire de mon travail, qui ne se seraient pas du tout intéressés à moi, je n'aurais pas eu envie de travailler pour eux. Et puis la nudité n'est pas un tabou. Non ce n'était pas difficile, pour la beauté du film.

Christophe : l'ambition était de mettre en valeur les acteurs et les actrices du film, non pas de montrer de la vulgarité. Ce n'était pas du tout le genre de François et, en tout cas, je n'aurais pas voulu partir dans ce sens.

François : En tant que mec, on a un amour du corps de la femme et l'idée c'est de montrer à quel point tu aimes ces corps, tu aimes ces femmes finalement. Il y a un petit côté déclaration d'amour. Surtout que dans le cinéma français actuel, je ne trouve pas qu'on les mette en valeur.

BLACKARIA est super bluffant visuellement. C'est extrêmement travaillé et crédible, alors que vous avez eu un budget très bas. Comment êtes-vous parvenu à ce résultat ?

François : Si le film est crédible visuellement, c'est grâce à la directrice de la photo, Anna Naigeon. J'insiste, parce qu'il faut rendre justice aussi à son travail. Elle a beaucoup, beaucoup donné sur le film. Et surtout, un détail qui se voit aussi à la fin de notre film, c'est une fan acharnée de Mario Bava. Forcément, quant on lui disait giallo, hop, la communication passait toute seule. Tu parles de crédibilité, ça me fait très plaisir. Il y a quelque chose que j'ai appris avec les échecs de mon film précédent, c'est la crédibilité d'un décor. Vu qu'on habite Montpellier et pas Paris, tout est beaucoup plus accessible. On a eu la chance de pouvoir trouver des décors ou de négocier à des prix pas trop chers pour les appartements. Ca donne tout de suite le côté baroque. On a aussi beaucoup tourné à La Grande Motte, parce qu'il y a un design très années 70s là bas. J'ai envie de te dire entre nous quels sont les décors que j'ai trouvé et comment on s'y est pris, mais j'ai peur de me faire chourer mes plans. Quand j'aurais du fric, je te promets, je balancerais tout.

Christophe : Je rajouterais une chose. Ceux qui ne connaissent pas le film et qui regardent un peu le générique, sont peut-être surpris de voir aussi Anna Naigeon dans les actrices. On en parlait souvent avec François, de prendre Anna comme actrice, parce que, quelque part, il y avait un attrait qui nous intéressait. C'était un charisme qu'on cherchait pour un rôle et Anna l'avait.

François : J'ai un ami photographe sur Montpellier, qui photographie des modèles, qui ont, je trouve, autant d'expression qu'un poisson rouge dans un bocal. Là, les filles, Clara, Aurélie et Anna, ont toutes les trois du charisme.

On les croirait tirées, justement, des films de référence vieux de 30 ans.

Christophe : Quand on parlait du cinéma italien des années 70, d'horreur, les références sont là. On a tenté de faire un éloge de ces films là, en essayant de prendre la beauté de ces femmes.

Parlons des effets spéciaux qui sont quand même très bons.

François : Grand merci à David Scherer pour ça. David nous a fait des cadeaux indéniables. Il a cru dans le projet, c'est lui qui nous a dit "Faites en un long, les mecs". il a vraiment donné une énergie, une crédibilité, il nous a soutenus jusqu'au bout. C'est le soutien aussi, au-delà de son travail.

Quel est l'avenir de BLACKARIA ?

François : L'idée est maintenant de faire une demande de subvention pour une version internationale, où on doublerait le film en anglais. On va l'inscrire au Marché du Film à Cannes pour essayer de le vendre. Je sais qu'il y avait un distributeur anglais qui était intéressé, un distributeur allemand aussi. En France, on rêverait de le proposer à Neo Publishing ou Le Chat qui Fume. L'idée c'est d'essayer de le vendre, pays par pays, en DTV bien sûr. J'aimerais bien créer un petit buzz avec ce film. Petit, mais pour rendre justice au travail de chacun, parce qu'ils ont assuré.

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Dossier réalisé par
Eric Dinkian, Sandrine Ahson & Xavier Desbarats
Remerciements
La ville de Sainte-Maxime, Michael Abbate, François Gaillard, Christophe Robin & Clara Vallet